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III - 8.8 Renoncer à la vérité
À supposer que la science et la magie - bien quévidemment contraires - poursuivent les mêmes fins et notamment celle de transformer le monde, à quoi tient donc le succès de la science (et de la technique qui en procède) ? Au fait que lhomme y renonce à la vérité. À sa vérité propre, spécifique, celle qui le définit comme un être démotion (sexué, généalogique, religieux, territorial) : à son humanité, pour se considérer comme une chose parmi les choses du monde. Cette mutation dans lhistoire du savoir prépare la réunification de lespèce, éclatée dans ses langues, ses terroirs, ses écosystèmes, ses phénotypes et ses idéologies. La techno-science permet de résoudre - supérieurement - certains desseins de la magie, mais elle demande, à lopposé de celle-ci, un esprit formé à lascèse de lobjectivité, fermé à la métaphore qui fonde son action, sourd à la polysémie qui procède du bruit des langues naturelles qui disent, elles, à raison de cette communication entre les réseaux significatifs, la participation de lhomme au monde. La réalité construite par la science na de nom dans aucune langue - et cest pourquoi elle peut être partagée par tous les hommes - elle nest dicible que dans le silence articulé de lalgorithme (Kojève). Je me hausse à cette conscience sans conscience dès lors que je me refuse à être tel homme, de telle tribu, de tel intérêt. Au lieu de vérifier ladage : cujus regio, ejus religio, selon lequel la production spirituelle est une spécialité régionale (tel terroir, tel roi, tel cru), je me fais cet idéal de lhomme que le stoïcien Chrysippe définissait comme le sujet dune société universelle, vivant de communs, coinonicôn, ou universaux.
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