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IV - 12.3 Le rire comparé aux états émotionnels causés par la surprise
Le contraire du rire nest pas le sérieux, cest la réalité.
(G.W.H. Hegel)
Le rire résulte dune perception globale, non analytique, de la situation gélogène : on rit avant de pouvoir dire pourquoi lon rit. (Cette perception est supposée impliquer le cerveau droit : vide infra, chapitre 18 à tout le moins une voie courte).
Le rire constitue une réponse réflexe à la rupture. (Il engage des circuits neurologiques capables de travailler indépendamment du cerveau volontaire ; les réflexes, par comparaison avec les réponses calculées, ont un double avantage de rapidité et dautonomie.)
Le rire est une réponse émotionnelle à la surprise. (Cette réponse procède pour simplifier dune mise en communication de laire de la personnalité, située dans le cortex frontal et du cerveau des émotions, ensemble de zones interactives engageant lhypothalamus, des régions sous-corticales, comme l'amygdale et l'hippocampe, ainsi que le cortex.)
La considération de ces trois données immédiates justifie une approche élémentaire du rire.
Au titre de lélémentaire, on peut commencer par rappeler que le rire est la plus violente et la plus banale des secousses émotionnelles.
Chacun void bien, développe Joubert (op. cit. p. 42) que pour le Ris, soudain le visage est ému, la bouche s'élargit, les yeux étincellent et pleurent, les joues rougissent, la poitrine est secousse, la vois antrerompue ; et quand il se déborde continué long-tams, les veines du cou s'anflent, les bras tramblent, et les jambes trepignent, le ventre se retire et sant grand douleur ; on roussit, on sue, on pisse, on fiante à force de rire et quelquefois on en evanouït.
Énorme, irrépressible, a fortiori quand il est contenu, comme l'exprime en mauvaise part Bernard de Clairvaux :
Ce moine qui a rempli son cur de pensées vaines et bouffonnes et dont le vent de la vanité ne peut, en raison de la discipline du silence, se répandre pleinement, est secoué déclats de rire jaillissant par les détroits de sa gorge. De honte, il cache souvent son visage, serre les dents, mais malgré lui, il rit, et contraint, pouffe de rire. Et quand de ses poings il obstrue sa bouche, on lentend éternuer par les narines. (Tractatus de gradibus humilitatis et superbiae, Patrologie latine, t. 182, col. 964)
ou Cervantès :
Don Quichotte se mit aussitôt à regarder Sancho et vit qu'il avait les joues enflées et en apparence tout prêt déclater de rire ; et comme Sancho vit que son maître avait commencé, il lâcha la bonde de telle façon qu'il fut contraint de se serrer les flancs avec ses deux poings pour ne pas crever. Il se calma par quatre fois et autant de fois recommença sa risée, avec la même impétuosité que la première [...] (Don Quichotte, édition de la Pléiade, 1969 : 173)
Lexpression des émotions est sous le contrôle du système nerveux autonome qui assure aussi la régulation automatique de nombreuses fonctions organiques. Ses opérations mettent en jeu deux sous-systèmes antagonistes : le sympathique et le parasympathique, laccélérateur et le frein. (Le système nerveux autonome est donc, par essence, sujet à linstabilité et au déséquilibre). Le premier commande le régime de laction. Il a notamment pour objet de mobiliser lorganisme en situation de danger : il augmente la production dadrénaline, accélère le rythme cardiaque, freine le péristaltisme digestif et réduit les sécrétions peptiques. Il fait dresser les cheveux sur la tête. (Le sympathicotonique a les pupilles dilatées et la bouche sèche, cest un surexcité ; il fait de lhypertension ou souffre dulcères à lestomac...). Le second a une fonction opposée de sédation et de détente.
Considérons lexemple classique des réactions en chaîne dont lorganisme est le siège devant une menace physique soudaine. À partir dun signal vigile, lalerte (un influx nerveux électrique) est transmise dans le centre des émotions. Lhypothalamus envoie un message chimique à lhypophyse qui augmente alors sa production corticotrope. Véhiculée par le sang, lhormone en cause stimule la sécrétion surrénale. Ladaptation est immédiate et spectaculaire. Le système agression-défense est mis sous pression. Les organes impliqués sont irrigués en priorité. La respiration devient plus forte et plus profonde. Le cur se met à battre plus vite et plus puissamment. Les muscles se durcissent. Les vaisseaux qui irriguent lappareil digestif et la peau se contractent : le sujet pâlit et la digestion est suspendue. En cas de blessure, lhémorragie est modérée, linflammation limitée, la coagulation plus rapide et la douleur moindre. (Un homme raconte que, se relevant après une violente chute de moto et retirant son blouson de protection, il constate quil a le bras arraché sans éprouver de douleur locale en proportion avec un tel trauma.) Le foie libère ses réserves de sucre pour alimenter les muscles. La transpiration augmente pour une ventilation dappoint indispensable pour assurer lhoméothermie générale pendant cette combustion accrue dénergie...
Nous navons pas choisi cet exemple au hasard, car les circonstances qui provoquent le rire causent aussi une surprise qui se résout, non par lagression ou la fuite, mais par une violence plaisante qui secoue le corps de... linterloqué. Comme la réponse au message danger, le rire est réflexe et organique. Il est des situations tendues, des conflits qui soudain se détendent et se résorbent dans un rire dautant plus salutaire, sinon dautant plus franc, quon a frôlé le drame. Cette alternative correspond à deux solutions dun même problème et, peut-être, à deux réponses à une même information neuropsychologique. Mais le rire est une émotion (subjective) avant dêtre une action (objective). Bien quune analyse psychologique et sociologique du rire puisse mettre en évidence une fonction agressive du rire nous y reviendrons cest cet aspect dhumeur, ou cet aspect endocrine, quil faut dabord considérer. Le rire apparaît alors comme la résolution soudaine dune crise qui se révèle sans danger (souvenons-nous de la définition dAristote). Il fait suite à une alerte qui nest pas une fausse alerte, mais à laquelle il est fait face et mis fin, non par des moyens externes et objectifs, mais par des moyens internes et subjectifs : par les moyens dune rassurance et dune réassurance endocrine.
Cest une banalité de constater que le rire développe des effets contraires à ceux de la peur. Regardons pourtant. Dans une bibliothèque, un type (vide supra) se lève de sa chaise, sempêtre dans celle de son voisin et manque de se casser la figure. On lit un temps détonnement stupide (ind.-eur. : *(s)teu : frapper) sur son visage, puis, presque aussitôt, il sesclaffe : détente. Il a eu chaud, il la échappé belle... Si lon observait au ralenti le film des mimiques de léclat de rire, il est probable que les premières images montreraient le visage dun homme effrayé, à tout le moins stupéfait ou incrédule, retrouvant, peut-être, la façon dont les anciens Grecs exprimaient le non : ananeuô (Lysistrata : 126 ; les faux ambassadeurs perses des Acharniens : 113 s. se trahissent à leur manière grecque de marquer le non, manière qui peut encore être observée aujourdhui - Eibl-Eibesfeldt, 1976 : 35 pour la traduction française de Der Vorprogrammierte Mensch) haussant le sourcil, rejetant la tête en arrière et relevant le menton, vérifiant cette exclamation quon peut entendre parfois au vu dune apparition bouffonne : Non ! cest pas vrai ! Cette mobilisation soudaine pour rétablir léquilibre sest immédiatement révélée efficace : rire.
Comme lalerte organique dont nous venons de rappeler le scénario et le dessein, le rire, cette violence qui secoue lagressé ou linterloqué et qui le dispense de secouer lagresseur ou linterlocuteur, se signale par une consommation accrue de substances neurorégulatrices, dites hormones de léveil, et cette décharge bruyante et brutale peut apparaître comme une destruction de munitions inutiles : le tir à blanc dune fantasia de soulagement ou dune victoire sans combat. Alors que le stress dalerte sexprime notamment par une augmentation du volume respiratoire qui multiplie la combustion énergétique, cest ici lexpiration qui commande le processus respiratoire : une expulsion violente et saccadée de lair inspiré, accompagnée de ces vocalisations, Ah, ah, ah ! qui résument le rire. Le rire est dit faire circuler dans le corps cette bonne humeur qui chasse les déchets de la combustion vitale et rétablit léquilibre en résorbant les toxines du stress. Alors que lalarme accélère le rythme cardiaque et provoque une contraction vasculaire et musculaire, le rire, ce spasme respiratoire, relâche les muscles (notamment les masséters - et parfois les sphincters), dilate les vaisseaux et apaise le cur.
Le propos de comparer le rire aux états émotionnels causés par la surprise rencontre nécessairement la fonction spécifique de lamygdale, lobule cérébral (pair) en forme damande (doù son nom), voisin de lhippocampe, spécialisé dans la capacité à ressentir et à percevoir les émotions comme la peur. (La stimulation chirurgicale de lamygdale engendre un sentiment confus de danger imminent et la peur ; les victimes daccidents vasculaires cérébraux qui affectent cette structure ne reconnaissent pas les émotions faciales de la peur...) Lamygdale, qui semble avoir en charge les questions vitales (danger, nourriture, reproduction, communication intraspécifique primaire), est connectée à d'autres structures cérébrales : lhippocampe, le thalamus sensoriel, lhypothalamus, le septum, le tronc cérébral, le cortex sensoriel et le cortex préfrontal.
Les différents modes opératoires de ce cablâge révèlent lamygdale dans son rôle de gestion des urgences vitales. Linformation en provenance d'un stimulus externe peut en effet arriver à lamygdale de deux façons différentes : par une voie courte, rapide mais vague, en provenance directe du thalamus sensoriel, et par une voie longue, plus lente mais précise et circonstanciée, qui passe par le cortex. Lintérêt évolutif de la voie courte est évidemment de précaution, soit de préparer lorganisme à faire face au danger avant toute expertise (thalamique, puis corticale) du stimulus en cause.
Darwin (1877 : 214) souligne la corrélation de la peur et du rire : après avoir cité Spencer (1863 : 114) à propos de la décharge (détente) du rire, il fait état dune observation rapportée du siège de Paris : lorsque les soldats allemands avaient été profondément impressionnés par une situation très périlleuse à laquelle ils venaient déchapper, ils étaient tout particulièrement disposés à éclater en bruyants éclats de rire à propos de la plus insignifiante facétie. Cest la peur qui fait rire, pourrait-on dire. Après. Bien que la mobilisation suscitée par la peur aie tendance à se libérer sur des prétextes anodins (objectivement peu risibles), le champ du risible est spécifique, même en ce cas de figure. Cest, par exemple, une quelconque maladresse. Cette liesse vaine et follatre (Joubert : 87) est un retour à la normale qui se saisit dun désordre pour réapprendre et réaffirmer lordre. Mais cette description homéostatique (résorption dune crise panique par une crise de rire) néglige un point dimportance. Le rire ne répondrait pas seulement au soulagement de lesquive, à lissue (finalement) heureuse dun mauvais pas, à lélimination réflexe, le danger évanoui, de substances roboratives. Le rire décharge, sans doute, mais il nest pas inutile de noter comment cette mécanique procède encore de limpulsion du danger. Car une propriété remarquable de ces hormones de léveil synthétisées par le cerveau mis en alerte est de libérer la production dendorphines, morphines naturelles qui agissent contre la douleur. Cette décharge dopium cérébral nest pas sans effet pour le sujet qui nous occupe. Car il existe une propriété bien connue de lanesthésie qui permet de mettre en relation physiologie et psychologie du rire.
Leffort physique continu entraîne une suractivation des neurones à noradrénaline. Lorganisme sadapte en produisant des opioïdes endogènes (endorphines, enképhalines et dynorpine, molécules régulant les fonctions vitales comme la perception de la douleur, la faim, la soif, le contrôle immunitaire) qui se fixent sur trois types de récepteurs largement distribués dans le cerveau : la fatigue laisse place à un sentiment d'euphorie.
Une double chaîne peut expliquer la relation entre inhibition et euphorie : lactivation de ces récepteurs provoquant louverture des canaux sodiques (abaissant le seuil dexcitabilité des neurones) ainsi que la diminution de production de GABA, molécule qui module (et modère) l'émission de dopamine.
En faisant décrocher lorganisme, en lâchant la bride de la vigilance, en neutralisant la régulation adaptative lanesthésie augmenterait aussi, à la manière des endorphines et des opioïdes cérébraux, la production de dopamine et, de ce fait, la sensation de plaisir.
La vigilance, tous les sens en éveil, quand tout est "sensible", est une "endoloration", permanente et tous azimuts. L'insensibilité chimique, antagoniste de la douleur, c'est du plaisir...
Le mot hilarant apparaît pour la première fois dans le dictionnaire en 1805 pour caractériser un composé chimique, le protoxyde dazote. On trouve dans Littré (s. v. Hilarant) la citation suivante extraite de lAbrégé de Chimie de Pelouze et Frémy : Le protoxyde dazote est impropre à la respiration ; introduit dans les organes respiratoires, il produit une sorte divresse qui lui a fait donner le nom de gaz hilariant. Le gaz hilarant allait devenir une attraction foraine. Moins plaisant, mais dune autre portée, le protoxyde dazote devait aussi révéler des propriétés analgésiques qui permirent lessor de la chirurgie moderne : lanesthésie générale a recours (pour partie) à ce gaz singulier. Le MEOPA (acronyme de : mélange équimolaire doxygène et de protoxyde d'azote) est aujourd'hui utilisé en pédiatrie pour ses propriétés antalgiques et sédatives (sédation consciente) (N2O/O2).
Quel rapport entre endormir la douleur et rire ? Lhypothèse ici développée consiste précisément à poser que cette proximité fonctionnelle de lanesthésie et du rire, chimiquement prouvée par les effets du protoxyde dazote, peut constituer une voie daccès à la compréhension du rire. En effet, que la cause soit purement matérielle (gaz hilarant, alcool... ; empoisonnement cérébral : rire sarde, par exemple ; atrophie cérébrale ou dégénérescence de la chimie neuro-médiatrice : épilepsie gélastique, maladie de Pick
où le sujet est incapable de rien prendre au sérieux ; chatouillement) ou purement intellectuelle (rupture brusque de la continuité noétique), le rire sanalyserait comme une suspension réflexe de la communication entre le cerveau du réel et le cerveau émotionnel permettant de supporter et dadministrer la dénégation de la surprise (dépourvue de danger) que constitue :
- la contradiction (Quy a-t-il, Polos ? Tu ris ? Est-ce là encore une nouvelle forme de réfutation, que de rire, quand quelqu'un dit quelque chose, au lieu den prouver l'erreur ? - Platon, Gorgias, 473 e) ;
- labsurdité ou linvraisemblance : cest le rire du nonsense ;
- la discordance ou lincongruité : un monsieur en frac et haut de forme, mais aussi
en caleçons ;
- la différence, cest la blague dite ethnique ;
- lhyperesthésie du chatouillement (vide infra).
Le rire sanctionne l'inadéquation dune réponse à situation donnée, une mauvaise adaptation et la corrige aussitôt (si je suis lauteur de la réponse inadéquate, je ris de moi-même, mais, le plus souvent, cest lautre qui fait rire
), au moins subjectivement. Il y a quelque chose de magique dans le rire, qui annule ou qui permet de saccommoder de la contradiction et de la contrariété. Cette magie est... neurochimique.
Etre en éveil, en état dit de vigilance, répondre adéquatement, être adapté suppose lactivité des organes des sens. Ceux-ci nous permettent de nous diriger dans lenvironnement et notamment de fuir les sensations douloureuses. Lanesthésie annule la capacité à sentir tout en causant un sentiment deuphorie selon le processus, résumé plus haut, quand les diverses molécules qui abaissent le seuil dexcitabilité des neurones augmentent la production de dopamine et le sentiment de plaisir.
Ce processus neurochimique, ce modèle peut servir de fil conducteur pour comprendre les diverses formes du rire. Toutes expriment diverses modalités de linsensibilité, cest-à-dire de déconnexion avec le réel. Ce mot dinsensibilité a bien sûr un sens physique, mais aussi un sens moral. Il signifie indifférence, froideur, dureté
et qualifie le refus de cette empathie naturelle que la présence dautrui engage. Ce qui fait rire, ce ne sont pas les choses, mais les hommes. Lorsque les objets ou les animaux font rire, cest quils sont anthropomorphes. Cette remarque circonscrit, en réalité, les enjeux du rire et permet de voir que le rire constitue le mode le plus expéditif de marquer lerreur et de sen démarquer. Errare, lerreur est humaine, humanum est..., dit-on (comme on le dit aussi du rire), et lon rit souvent de ses propres erreurs (quand elles sont bénignes : quand je mets, par exemple, le pied droit dans la chaussure gauche). Ce qui spécifie lhomme, en effet, cest bien lerreur. Animaux dénaturés, nous ne savons plus de manière instinctive. Il nous faut apprendre, corriger lerreur : ...perseverare diabolicum. Si la vérité peut et doit sapprendre, alors le rire, sanction plaisante de lerreur, peut sanalyser comme un outil et une propriété de lapprentissage (vide infra). Le bonheur den rire me confirme dans limpossibilité de ce que je vois (ou de ce que je fais)
et me permet dannuler lerreur, labsurdité, la différence
Cette méprise, maladresse, bourde, réponse inadaptée
naffecte pas la vérité, ma vérité. En réalité, quand jen ris, je ne suis affecté par cette erreur quémotionnellement (et non rationnellement) : le rire est cette ardoise magique qui efface lincongruité dune secousse du diaphragme, dune vocalisation : ah ! ah !, dun haussement spasmodique des épaules et dune décharge endocrine.
Prospectus pour une démonstration de gaz hilarant,
1844, Nouvelle-Angleterre, vint-cinq cents linhalation.
(La publicité qui suit ne correspond pas strictement au texte qui a été traduit infra, émanant dune autre source bibliographique : Moody, 1978.
Le dessin qui agrémente cette réclame, repris de la caricature reproduite infra, est quelque peu contradictoire avec son contenu.)
Une grande démonstration des effets produits par linhalation de Protoxyde dAzote, ou Gaz Hilarant ! sera donnée à lUnion Hall ce (Mardi) Soir, 10 décembre 1844.
Trente gallons de gaz seront préparés et administrés à ceux qui, dans lauditoire, désireront en inhaler.
Pour commencer le spectacle, le Gaz sera inhalé par douze jeunes gens qui se sont portés volontaires.
Huit costauds ont été engagés et se tiendront au premier rang afin déviter que, sous linfluence du gaz, personne ne se blesse ou blesse quelquun dautre. Ladoption de cette mesure vise uniquement à écarter toute appréhension de danger. Il est probable que personne ne cherchera à se battre.
Le Gaz agit sur ceux qui linhalent en fonction du trait dominant de leur caractère. Il les fait soir Rire, Danser, Parler ou se Battre, et ainsi de suite. Ils semblent conserver assez de lucidité pour ne pas dire ou faire des choses quils auraient loccasion de regretter.
N.B. Le Gaz ne sera administré quà des hommes dune parfaite honorabilité. Ceci afin que le spectacle reste, à tous égards, dans les limites du bon ton.
Ce dessin sans légende de Cork (relevé dans Zeitgenossen karikieren Zeitgenossen, Rhurfestspiele Recklinghausen, 1972 : 208)
pourrait servir dillustration à la chimie du rire.
Toutefois, à la différence de la molécule de benzène retenue par le dessinateur, qui autorise, par symétrie, une symbolisation spatiale du rire - qui permet de faire éclater le rire - la représentation à laquelle lexactitude obligerait (N2 0 au lieu de C6 H6 ) est moins photogénique.
La carrière parallèle dune attraction foraine
La première opération sous anesthésie est réalisée sur lanimal, en 1824, par inhalation de gaz carbonique. Le protoxyde dazote (N2O), obtenu par la combustion du nitrate dammonium, est isolé en 1772 par le philosophe Joseph Priestley, pasteur, théologien et chimiste qui, en butte aux persécutions des autorités pour son socinianisme et du populaire pour les émanations diaboliques que ses cornues répandaient autour de sa maison, sexile en Nouvelle-Angleterre. Les propriétés anesthésiques et inébriantes de ce gaz sont relevées en 1799 par Davy ; la première application clinique est faite par le dentiste américain Wells, en 1846 (cobaye de ses propres expérimentations, Wells sombrera dans la folie).
Le gazomètre à protoxyde d'azote de la Buffalo dental manufacturing C°
http://www.bium.univ-paris5.fr/sfhad/cab/texte08.htm
Production du N2O :
- Décomposition du nitrate d'ammonium par la chaleur : NH4NO3 = N2O + H2O.
- Décomposition d'un mélange équimolaire de sulfate de sodium et de nitrate de sodium à 240°.
- Réduction d'acide nitrique ou de nitrates.
http://library.med.utah.edu/kw/derm/pages/ni05_3.htm
"Nitrous oxide seems to exert its effect in the brain via release of endorphin. In my experience, if the patient is taking opiates, that the concentration of nitrous oxide I use (50 volume %) generally produces no apparent sedation and analgesia." (John L. Bezzant,M.D.)
Le protoxyde dazote a plus récemment fait parler de lui dans une affaire criminelle : la mort sur table, après anesthésie, à lhôpital de Poitiers, le 10 octobre 1984, de Mme Nicole B. Comment une patiente jeune, ne présentant aucun antécédent cardiaque, aucune contre-indication à lanesthésie na-t-elle pu être réanimée après une narcose dont la première phase sétait déroulée normalement ? Comment, au contraire, pouvait-elle présenter soudain des signes de cyanose alors quon lui administrait (croyait-on) de loxygène à des doses de plus en plus élevées et que ses poumons étaient régulièrement ventilés ? Cest (vraisemblablement) quune main criminelle avait inversé les flexibles amenant respectivement au respirateur loxygène et le protoxyde dazote, repérables par des bagues de couleurs différentes et que lanesthésiste-réanimateur asphyxiait sa patiente en lui administrant du protoxyde dazote à haute dose tout en croyant loxygéner.
Le Monde du 16 février 1988
La sédation consciente par inhalation d'un mélange de protoxyde d'azote et d'oxygène est caractérisée par un début de dépression du système nerveux central, notamment du cortex cérébral. Elle entraîne une baisse de la vigilance, une diminution de la sensibilité et, parfois, une amnésie partielle.
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