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IV - 12.3 Le rire comparé aux états émotionnels causés par la surprise
(suite)
Lébriété de lanalgésie, déconnexion du cerveau sensoriel et du cerveau émotionnel, signalerait donc, non seulement une cause matérielle, exogène, du rire, mais en révèlerait aussi la fonction. (En sorte, dailleurs, quil ne serait pas nécessaire de postuler lexistence dune hormone spécifique du rire, comme a pu le faire un professeur de médecine de luniversité François Rabelais de Tours quil a proposé dappeler rabelaisine si celui-ci est une conséquence banale dune disjonction adaptative circonstancielle qui a pour objet premier de préparer le corps à braver la douleur). Dans cette optique positive, on pourrait comprendre le rire, énergie contenue qui se libère soudainement, selon la définition de Raymond Devos, détente de la tension vitale, (et symbolisant banalement lactivité de détente), non seulement comme une correction homéostatique résultant de la résorption naturelle des analgésiques cérébraux produits en situation de danger, comme la détente dune peur sans cause (sérieuse), leuphorie dune analgésie sans objet, mais, à partir de ses effets, dans sa fonction objective dadaptation au réel. Le spasme expulsif, lexplosion qui caractérise le rire Novalis rapprochait le rire et létincelle électrique brûle les poisons du stress et rétablit léquilibre neuro-végétatif par une correction du parasympathique sédatif, temporisateur, parégorique, anesthésique au détriment du sympathique qui commande laction.
Et cest bien dans sa fonction, paradoxale mais nécessaire, dadaptation au réel, dans son rôle dans lapprentissage, que se révèle cette signification originelle du rire, comme le suggèrent et lontogenèse et la phylogenèse. Le rire-jeu que ladulte engage avec le tout-petit est évidemment fonction de sa capacité de réponse, de la maturation de son équipement neurosensoriel et expressif. Dabord révélant à lenfant son entité corporelle (balancements et chatouilles : la petite bête qui monte
), cette interaction se complexifie à partir du sixième mois dans des jeux sociaux où les limites somatiques et les rôles sont expérimentés, notamment dans le jeu emblématique de lattente et de la surprise espérée de la disparition et de la réapparition de la face (coucou !). Lobservation systématique de la naissance du rire chez le petit enfant (Sroufe et Wunsch, 1972 ; Sroufe et Waters, 1976), à partir de la douzième semaine, révèle que le rire sanctionne la maîtrise de situations insolites, lexploration réussie de la nouveauté et la réassurance cognitive dans des conditions de sécurité et de familiarité, avec des proches ou des figures connues, et dans un climat de détente et de jeu. À l'inverse, en effet, telle situation qui, dans ce contexte de sécurité, se dénoue par le rire, va provoquer les pleurs du petit si elle dure trop longtemps ou si la surprise est trop forte. Le rire est la récompense dune peur maîtrisée.
Associé au jeu, le rire lest phylogénétiquement à la découverte et à lapprentissage. Cest précisément dans cet environnement que léthologie a pu établir, chez le primate, lorigine vraisemblable du rire (Van Hoof, 1972 et 1978). Le jeu apparaît dévidence dans le règne animal comme étant le privilège du jeune. Dans les relations engageant la mère et son petit, ou des jeunes entre eux, les primates utilisent régulièrement des mimiques, que nous qualifierions anthropomorphiquement de rictus, qui paraissent être une ritualisation (au sens de Huxley) signifiant au congénère lintention ludique de linteraction proposée. Si leuphorie du jeu, comme leuphorie du rire, vaut insensibilité au réel, comme il a été noté, les signes de cette insensibilité découvrir les dents : vide infra peuvent annoncer cette intention. Un tel échange de signes accompagnant la provocation pour rire sobserve couramment chez lhomme. À loccasion dun arrêt, le jeune chauffeur dun taxi-brousse subtilise à son coéquipier une mangue dans laquelle celui-ci sapprêtait à mordre
Il lui signifie aussitôt en découvrant les dents et en riant bruyamment le caractère ludique de ce vol à larraché. Lautre ne peut que rire à son tour sous peine de se mettre hors-jeu, de se voir accuser de tout prendre au sérieux, de nêtre pas drôle, etc. Le cerveau analytique des mammifères se caractérise aussi par des programmes dapprentissage ouverts et une plus ou moins longue néoténie. Cest par imitation et par jeu que le jeune assimile les techniques dalimentation, de chasse, de défense
et quil fait, sans risque (au seul risque de se faire corriger, cest le mot, par les adultes qui surveillent les jeux infantiles et par la dure loi de la réalité), lépreuve de la vie. Les jeux locomoteurs provoquent des modifications dans lorganisation synaptique du cerebellum et dans la distribution des fibres musculaires (Byers et Walker, 1995). Des chimpanzés privés de jeux (et notamment de jeux dobjets, soit de manipulations non fonctionnelles) savèrent moins compétents dans l'utilisation doutils (Byrne, 1995).
Le jeu est cet état desprit où sapprend le réel, lessai gratuit de situations à vide, pour rire, un entraînement. Cest juste pour rire, c'est pas pour de vrai. Le spectacle de la réponse inadéquate, qui nous fait rire, nous replonge immédiatement dans cette enfance de lart, quand on ne sait (presque) rien, dans ce vert paradis des enfantillages, bain dinnocence formatrice qui prépare à affronter le réel. Avec ce surplus de vitalité, tel le cabri qui cabriole et décolle du sol des quatre pattes à la fois ou le chiot qui guenille à mort la savate de son maître, le petit est infatigable et incorrigible : il faut souvent le rabrouer dun bon coup de dents ou dune chiquenaude pour qu'il vous fiche la paix et quil apprenne il couine un peu, et remet ça cinq minutes plus tard. Un proverbe japonais dit quil est tout aussi impossible dempêcher les enfants de grimper que la fumée de monter. Le naturel du jeu enfantin, associé à linsouciance et à la joie de vivre, nous stupéfie donc dautant plus quand nous regardons jouer les enfants des rues dans les villes du Tiers Monde, qui nous paraissent avoir
toutes raisons de souciance. Il y a dans létat desprit du jeu et dans létat desprit du rire une fraternité originelle. Cest vraisemblablement parce quil est programmé pour apprendre, cest-à-dire pour se tromper, que le petit doit être blindé, protégé de l'erreur, insensible. Toutes choses égales dailleurs, certes. Cest en effet une évidence de dire que lenfant pleure plus souvent que ladulte, mais cest en une autre, complémentaire, de dire quil rit et quil joue davantage. Entre les deux rails de lheuristique qui permet de découvrir le monde, innocente cyclothimie de parties débridées et de gros chagrins, le monde enfant, sous la protection de ladulte qui surveille et console, nest que jeu. Linsouciance et lirresponsabilité, linconscience et livresse, linsensibilité, propriétés du jeu et de la curiosité infantile, sont nécessaires pour surmonter lappréhension de linconnu pour découvrir. Cest en jouant qu'on apprend à gérer des situations dont on peut ensuite se jouer. Il faut répéter, engrammer la bonne réponse. Mais pour ce faire, il faut y aller bille en tête. Pour apprendre, mieux vaut donc être hors de la réalité qui oblige, qui impose la vigilance et le sérieux , habiter la bulle de lenfance. (Le plaisir du rire, leuphorie, note Freud dans Der Witz und seine Beziehung zum Unbewussten, exprime lhumeur de notre enfance). Le jeu et le rire, incitation et prime à lapprentissage, permettent ainsi dobserver le passage de la position passive à la position active : ce qui a provoqué lamusement du petit est à son tour activé par le petit. Il existe dailleurs un comique spécifiquement destiné aux enfants, celui du clown. Le clown est un adulte qui fait tout à lenvers et en dépit du bon sens et qui fait rire des enfants qui savent le bon sens. Dans le dialogue qui, généralement, sengage entre lartiste et son public, les enfants enseignent cet adulte grotesque et sympathique qui fait lenfant des enfants.
The Tickle Song
There's a terrible big green monster
And he's looking right at me---
a hairy big, scary big, monster I wish I didn't see.
He's getting so much closer,
It's looking pretty bad.
I know...
I'll tickle his nose.
I'll tickle his toes.
I hope it doesn't make him made.
We'll tickle, tickle, tickle, tickle,
Tickle, tickle, tickle, tickle,
Tickle his hairy green face.
We'll tickle, tickle, tickle, tickle,
Tickle, tickle, tickle, tickle,
Tickle him every place.
We'll tickle his foot.
We'll tickle his knees.
We'll tickle where he hears.
We'll tickle where he sees.
Then the monster laughed:
"Ha, ha, hoo, hoo--
You guys tickled me.
Now I'm gonna tickle you.
Tickle, tickle, tickle, tickle, tickle.
www.imagineproject.org/ tickle.html.
La primatologie (Plooij, 1979 ; Fossey, 1983) invite également à considérer linteraction de la mère et de son petit dans cette activité qui a aussi le rire pour effet (et pour objet), les chatouilles. La question du chatouillement est une discussion fort sérieuse, doctrinalement ouverte par le Stagyrite (Parties de animaux, 673 b 7-10 ; Problèmes, section XXXV) (pour lépoque moderne, voir : Joubert, 1579, en continuité avec les discussions aristotéliciennes sur la fonction du diaphragme dans le rire ; Darwin, 1872 (1877) ; Hecker, 1873 ; Weiskrantz, 1971 ; Blakemore, 1998 ; Pankseppe, 2003) quand il fait état de cette observation selon laquelle une chatouille attendue est moins efficace quune chatouille qui arrive par surprise et quon ne peut se chatouiller soi-même.
www.touchneeds.com
Le cerveau (le cervelet) annule, en effet, les sensations proprioceptives (produites par le propre corps du sujet : personne est étranger à soy, explique Joubert - op. cit. p. 204) et lirruption de la chatouille attendue est tempérée par cette représentation. Pour (se) chatouiller il faut donc au moins être deux. Les chatouilles peuvent être réciproques, agonistiques, mais il existe souvent une dissymétrie dans cette interaction qui indique vraisemblablement sa portée pédagogique. Livresse du jeu (les parents préviennent : Ça va mal finir !... Ça va tourner en eau de boudin ! Il va bientôt y avoir des larmes !...) à laquelle se livrent les enfants lest particulièrement des chatouilles auxquelles, provoqués par des adultes familiers (qui, d'ailleurs, se font aussi rabrouer : Jeux de mains, jeux de vilains... une loi fédérale, en Virginie, interdit de chatouiller les petites filles), les provoquant aussi, ils sabandonnent jusquà la suffocation, s'enfuyant devant ladulte taquin tout en se laissant attraper par lui (Attrape-moi si je veux...), dérobant ces zones offertes à la stimulation, appelant cette sensation insoutenable, recherchée et repoussée... Le plaisir spécifique des chatouilles signale à la fois la contenance et la perte de contenance et permet de distinguer le soi du non-soi, de faire lexpérience dune impossible fusion (Je taime, moi non plus) dans lépreuve des échanges corporels.
Alors que la sensibilité tactile de la surface peau est sous contrôle et peut être gérée avec sagesse : Trop gratter cuit, trop flatter nuit, le contact des zones gélogènes paraît engager, sinon des réactions réflexes au sens strict, du moins une sensibilité spécifique des parties les plus vulnérables du corps les zones gélogènes ne sont pas normalement accessibles. Le chatouillé paraît à vif, tel un écorché, et le chatouillement, comme le montrent certaines pratiques sado-masochistes, peut être un supplice. (On trouve sur le Net, doù sont extraites les illustrations qui suivent, des sites dévoués à cette pratique : The definite source for tickling fiction & art, proclame lun d'eux...)
www.mtjpub.com/ ecomics/vu.html
Cette hyperesthésie, défaut dans la cuirasse de notre contenance, est une voie d'accès à l'intimité quand le simple contact corporel, lhétéroception, de même que la pénétration dun étranger dans la proxémie, suscitent esquive et retrait. Les chatouilles font partie des préliminaires sexuels, comme le rappelle cette devinette sexiste : Entre quels orteils une [blonde/brune] est-elle le plus chatouilleuse ? Réponse : Entre les deux gros orteils.
Cest lorsque le corps est sans défense, en supination, que ces zones réservées sont ouvertes ou offertes. Éducatrices ou sensuelles, les chatouilles du parent ou du partenaire, ces petites bêtes qui montent, qui montent..., car la main du chatouilleur est suspendue, ores touchant, ores se retirant (dans les parties caves du corps) (Joubert, op. cit. p. 198), qui simmiscent soudainement dans lintimité avec les bras multipliés, touchers hécatonchires et doigts fourmillants (de la divinité indienne ou du monstre représenté plus haut), mise en scène de labandon provoquant à la fois un relâchement convulsif du maintien et une reprise de la contenance, constituent une sténotypie ludique de lexpérience des limites, à la fois du corps et du supportable. Vray est que cette volupté déplait [ce sentiment du plaisir déplaisant] parce que les parties fort délicates, refusent lattouchement étranger, tant soit-il léger et mignard. (ibid. p. 201-202) Sur le mode de la fermeture plaisante de la vérité (le haussement de sourcils du non des grecs ; peut-être la racine I.-E. *smey-, grec meidos, lat. mirus qui a donné le mot grec pour être ébahi , bouche bée puis (sou)rire), le chatouillé profère un oui qui dit non, quand le rieur émet un non qui dit si.
Mais le caractère ambigu du chatouillement ne doit pas masquer à lobservation son caractère social. Le fait que lon ne puisse se chatouiller seul (alors quon peut rire seul) souligne la fonction communicative tant des chatouilles et des agacements qui provoquent le rire que des vocalisations qui le caractérisent. Et cest, précisément, aux défauts de la cuirasse individuelle, aux zones gélogènes, que se décompose l'individu et que se compose le groupe. Quand la maman primate accède à la demande de chatouilles de son petit, elle ne lui apprend pas seulement les limites individuelles, elle éprouve aussi, dans un jeu partagé, sa capacité relationnelle. Si lautisme en contre-exemple paraît exprimer une inappétence à la société (signalant une inaptitude à lire les émotions sur le visage in facie legitur homo et, selon une observation récente (Gervais et alii : "Abnormal cortical voice processing in autism", Nature Neuroscience 7, 801 - 802, 2004), une incapacité neurologique à distinguer la parole du semblable dans le bruissement du monde : la voix humaine porte, en effet, des informations non-verbales constituant une sorte de signature ou de visage auditif de lémetteur dont linterprétation mobilise des régions corticales spécifiques, le long du sillon temporal supérieur qui, en lespèce, restent inactives) alors le jeu des chatouilles, à linverse, démontre un goût de léchange, préalable et nécessaire à la communication, qui augure favorablement de la socialisation.
William Bouguereau (1825 - 1905)
Sur ce substrat évolutif de lassociation et de la grégarité, les diverses formes du rire peuvent être comprises dans la continuité dune telle fonction : le rire, faculté primaire dagrégation. Chatouiller, cest sortir de ses propres limites et pénétrer dans lespace privé dautrui, cest problématiquement faire société avec, si la victime (consentante) entre dans le jeu. Si lon extrapole au groupe les pratiques duelles du chatouillement, son ambivalence disparaît et se révèle alors sa fonction sociale. Le chatouillement privé (pédagogique, sensuel ou sadique) exploite vraisemblablement un dispositif de récompense à la formation du groupe, dans lesprit des rituels de mise en condition des prédateurs sociaux avant une chasse : poussées, jappements, morsures..., ébats codifiés qui préparent les membres de la meute à ne faire quun seul. La reconstitution publique des liens sociaux, telle quon peut lobserver au point de rencontre Arrivée des aéroports : embrassades, accolades, étreintes, tapes
, manifestations et congratulations riantes et bruyantes des retrouvailles, met en uvre de tels échanges physiques qui baissent progressivement dintensité quand le groupe est reformé et que chacun se reprend. Il nest guère de composition de groupe qui ne fasse appel à ces échanges corporels. Monômes (détudiants), équipes (sportives ou professionnelles cf. la gymnastique fusionnelle dans lentreprise japonaise), brigades, cercles, troupes, bandes, cliques, communautés, foules
se constituent et vibrent à lunisson dans les raouts, foires, noubas, messes, ramdams, sabbats, meetings, concerts, matches..., assemblées panmictiques où les transports et les vociférations (holas, clameurs
) expriment les sentiments et les impulsions de lochlos, lanimal collectif.
Obligé pédagogique dans l'apprentissage des tout-petits (exemples infra),
insoutenable quand on est adulte.
Fingerplays Booklet - Tickles and Lovies
http://www.pcl.lib.wa.us/fingerplays/tickles.htm
"Rhymes, poems, fingerplays, tickles, movement games besides being fun, also enhance your childs:
memory skills
vocabulary
imagination
humor
spatial awareness
motor coordination
relaxation
and so much more
Games, rhymes, wiggles and tickles have inspired laughter and joy in infants, toddlers, and young children for generations, strengthening the bonds between children and the loved ones in their lives."
Hurry Scurry Little Mouse
Hurry scurry little mouse
Starts down at your toes. (touch childs toes)
Hurry scurry little mouse
Past your knees he goes. (touch childs knees)
Hurry scurry little mouse
Past where your tummy is. (touch childs tummy)
Hurry scurry little mouse
Gives you a mousy kiss. (give child loud kiss)
These are Babys Fingers (touch childs fingers)
These are babys fingers, (touch childs toes)
These are babys toes,
This is babys belly button, (touch childs tummy)
Round and round it goes! (tickle childs tummy)
Round and Round the Garden (make a circle in childs palm)
Round and round the garden
Goes the teddy bear (fingers walk up childs arm)
One step, two steps, (tickle child under arm)
Tickle you under there
Round and round the haystack (make a circle in childs other hand)
Goes the little mouse
One step, two steps (fingers walk up childs arm)
Into his little house (tickle child under arm)
Ces interactions sexpriment identiquement dans ce chatouillement sans contact quest le rire de groupe : un rire sans autre objet que de faire savoir (aux membres du groupe et à la cantonnade et à soi-même) quon est bien en phase, sur la même longueur donde, etc., un test de connivence. Provine et Fischer (1989) ont judicieusement souligné, alors que la tradition philosophique focalise la réflexion sur le rire cognitif, le rôle de contact, entre les membres dun même groupe, dun rire sans autre raison que cet assentiment : le plaisir de faire bande. Cest, banalement, faire société avec. Rire ensemble signifie ici quon est membre du même club. (Cela est si vrai que les clubs de rire, qui mettent en uvre le rire sans raison ou le yoga du rire, nont pas dautre objet et tiennent, au moins le temps dune séance, par ce seul ciment). La constitution du groupe requérant une porosité élective des individus qui le composent, la mise en contact que le chatouillement réalise (avec lambiguïté associée au toucher), le bain dhilarité du rire, cette vapeur hilariante qui paraît flotter autour des rieurs, la met en uvre aussi. Les émotions contradictoires révélées par la dialectique du chatouillement (non, oui puis non ; plaisir déplaisant ; mais oui, au bout du compte jusquà un certain point...) peuvent constituer un modèle pour comprendre la formation et léconomie de ce super-organisme, composite et temporaire, quest le groupe. Les réunions, conseils, séminaires professionnels... font ainsi apparaître une administration du rire conforme à la hiérarchie du groupe concerné. Si le rire peut difficilement être contrefait (infra), en revanche il peut être commandé. Ce sont les chefs qui font rire, et beaucoup plus rarement les subordonnés. Quand il y a un boute-en-train dans le groupe, ses sorties sont canalisées et avalisées par le chef. Celui-ci, qui mesure sa position à la qualité de la rétroaction quil engendre, aux retours de sa parole ainsi quaux rires en écho suscités par ses bons mots, ne peut se permettre de voir le groupe se reconstituer sur des bases qui lui échappent. Le rire (lauteur du bon mot) polarise, en effet, et prend en otage, tel lélectro-aimant de lIRM le spin des noyaux dhydrogène qui se tournent vers lui comme un seul, tous les membres du groupe et les éventuels électrons libres...
Ce que le chatouillement opère mécaniquement et avec ambiguïté, le rire de situation lopère sémantiquement et apparemment sans réserve (sauf à exclure les non-rieurs) : détendre latmosphère, briser la glace, faire fondre les préventions, souder les individus... Et ses manifestations peuvent être tout aussi mécaniques : bruyantes vocalisations, tapes dans le dos, bourrades, claque dans la main de celui avec qui on en partage une bien bonne, toutes formes de contact à rapprocher du rituel de mise en condition et des sténotypies cités. Le rire sémantique se déploie alors dans le registre du contact et de la connivence. Cest de la société en partage et en acte, un frotti-frotta corporel, émotionnel, intellectuel... Investissant le circuit récréatif et roboratif de la formation des groupes, critique bruyante de la différence (contre), en même temps quassentiment tapageur de lidentité (avec), le rire administre ainsi une correction subjective (endocrine) en même temps quune correction objective de lerreur sociale (défensive : le groupe se referme sur les rieurs et offensive : rire, cest montrer les dents infra : 12.8).
Lexploration par le rire, ostensible et bruyante, extériorisation de la joie dans un environnement sécurisé, permettrait donc à lenfant de faire lépreuve de son corps, dapprendre et de faire société, de mettre sur le monde des balises de vérité, dexpérimenter la causalité matérielle et sociale. Si le rire, empreint de cette excitation intellectuelle et psychique, de cette intensité qui caractérise le jeu est un moyen dapprendre, lindice de la découverte de la vérité, la récompense et la douce intempérance de la dure école de la vie, alors le spectacle de lerreur replonge immédiatement celui qui sait Non ! ça nest pas vrai ! dans ce bain divresse où se découvre la vérité. Le rire dhomo sapiens est lexpression du plaisir du vrai. Moyen (positif) daccès à la vérité, il devient le moyen (négatif) de son authentification. Plaisir du vrai et plaisir du faux. Le plaisir du rire est le shoot qui récompense la reconnaissance de lerreur.
Si nous navions pas besoin dapprendre, nous naurions pas nécessité de rire. La maîtrise du réel, ladresse, de même que la vérité, ne font pas rire. Elles provoquent lacquiescement tacite ou ladmiration. Alexandre : Papa, raconte-moi une histoire drôle. Papa : D'accord. C'est une devinette. Est-ce que tu sais pourquoi il y a un trou au fond des pots de fleur ? Alexandre Euh ! Bof !... Pour que l'eau puisse s'écouler ? Mais non, Alexandre, c'est vrai donc ça n'est pas drôle... La vérité ne fait pas rire. Cest celui qui ne comprend rien à rien qui fait rire. Deux quidam se croisent par hasard après s'être perdus de vue : Mais qu'est-ce que tu deviens ? Cela fait un bail quon ne te voit plus ! Ah ! Jai trouvé du boulot. Ah bon ! Et quest-ce que tu fais ? Je suis fakir dans un cirque Ouah ! Et ça consiste en quoi ? Je suis allongé sur une planche à clous et je dois jeûner pendant quarante jours. Et c'est bien payé au moins ? Non, mais je suis nourri et logé... Le succès du bouffon tient évidemment au plaisir que nous prenons à nous repaître de lerreur. Le spectacle, le cirque en particulier, est justement ce cercle où lon se refait une santé anthropologique, et notamment aux dépens de la déformation et de la difformité. Le rire sanctionne la dégradation, lincongruité descendante de Spencer. Jamais, en effet, lélévation. Si le clown du cirque Franconi (selon lexemple de Spencer), qui se prépare à exécuter le saut que vient de réaliser lacrobate au-dessus des chevaux, répétait à son tour lexploit auquel les spectateurs viennent dassister (au lieu de sarrêter tout à coup au premier cheval après avoir pris un élan formidable, se contentant de brosser la poussière de la croupe là où il était supposé prendre ses appuis) alors ce ne sont pas les ah ! ah ! brefs et sacccadés du rire qui jailliraient du public, mais bien un long Aah ! dadmiration, celui qui sanctionne le dépassement de lhumaine condition.
Mais cette maîtrise est aussi culturelle. Les blagues ethniques démontrent à lenvi (notamment) que nous (le cercle des rieurs) sommes dans le vrai et que lexpertise de la réalité que fait lautre est fausse, tellement fausse quelle fait rire. De more satis risi. Cest ma coutume, cest ma théorie du réel qui est la bonne. Lautre homme est stupide : inadapté. Il ignore les fondamentaux, ceux, justement, que lapprentissage, que la culture, permet de faire siens.
Florilège
L'autre ignore :
- La classification des êtres (et confond, par exemple, le mécanique avec le vivant) :
Comment reconnaît-on un [...] dans un aéroport ? Réponse : Il donne des graines aux avions...
- la nature même du vivant :
Au cours de son procès, on reproche à Bokassa le bilan particulièrement meurtrier de ses camps d'internement. Il argumente pour sa défense :
" Quand on vient me prévenir d'un décès, il est parfois trop tard"...
[cet ancien caporal de l'armée française avait probablement lu Mark Twain :
The reports of my death are greatly exaggerated...]
- idem (extrait d'un recueil antique de 265 blagues et facéties intitulé Philoghelos, attribué à Hiéroklès et Philagrios) :
Lors des funérailles d'un illustre citoyen de Cumes, un quidam, étranger à la ville, demande à ceux qui suivent le cortège : " Qui est le mort ?" Un habitant se retourne et répond en montrant le corbillard : " C'est celui qui est couché dans le cercueil."
- les divisions élémentaires du règne animal :
Un joueur [de foot], philosophe Thierry Roland, commentateur vedette de TF1, peut être fauché comme un lapin en plein vol.
- La nature des éléments :
Pourquoi les [...] ne font-ils pas de ski nautique ? Réponse : Parce que chez eux, il ny a pas de lac en pente...
- La signification de lespace :
Un pilote [...] atterrit sur une piste dont on lui a dit quelle était extrêmement dangereuse en raison de sa très faible longeur. Il réussit à se poser en mordant généreusement lherbe et, lavion immobilisé : Ils ont bien eu raison de me prévenir de la faible longeur de cette maudite piste, mais alors ! quest-ce quelle est large !
- Les marques élémentaires de la civilisation :
Comment reconnaît-on un [...] dans un magasin à chaussures ? Réponse : Il essaie les boîtes
- À linverse, il applique les conventions humaines au règne animal :
Cest un [...] qui, au temps de César, est jeté aux lions. Quand il constate quil est seul avec le fauve et quil ny a pas dissue, il se met à courir autour de l'arène. Lanimal lobserve quelque temps, puis se met à courir après lui. Les spectateurs encouragent le [...] et, comme le lion se rapproche dangereusement, lavertissent : Attention ! il va te rattraper ! Le [...] se retourne alors et crie aux spectateurs : Ne vous inquiétez pas ! Jai un tour davance !
- L'autre ignore, bien entendu, la polysémie :
En révélant à ses lecteurs qu'"un trou de balle [avait] été découvert à la base du dos de la victime", Le Provençal du 23 février 1960 a incontestablement réalisé un scoop (à raison souvent cité) ;
Pourquoi les [...] se mettent-ils en pyjama pour faire de la moto ? Réponse : Cest pour mieux se coucher dans les virages
- Il incarne le dépit du bon sens :
C'est deux SDF qui se croisent dans la rue :
Dis donc, ça fait un bail que tu as disparu, dit l'un ! Qu'est-ce que tu deviens ?
J'ai trouvé du boulot.
Ah bon ! et qu'est-ce que tu fais ?
Je bosse dans un cirque : je dois jeûner pendant 40 jours et rester allongé sur une planche à clous.
Ouaouh !!! C'est bien payé au moins ?
Non, mais je suis nourri et logé.
Que fait un[e] [blond[e]/brun[e] quand on lui donne un éventail ? Réponse : Elle [Il] agite la tête.
Un hélicoptère sécrase sur un cimetière en [...]. La police [...] a déjà identifié 300 victimes
- Lautre, en somme, est la sottise personnifiée, plus lourdingue que la matière même :
Quand un [...] sappuie sur un mur, le mur sécroule. Pourquoi ? Parce que cest toujours le plus intelligent qui cède
- Bien évidemment, les chances de transmettre ses gènes (comme dit la vulgate évolutionniste) de cet autre inadapté sont quasi nulles, ainsi que le signifie ce type d'histoire :
C'est un [...] qui est sur la plage avec un [...]. Il s'étonne des succès amoureux de son voisin et lui demande comment il s'y prend pour lever autant de filles. L'homme à femmes répond : "C'est facile ! Je vais te dire le truc que j'utilise : Tu prends une belle pomme de terre et tu la mets dans ton maillot de bain. Tu te promènes sur la plage avec ça. Tu vas voir. C'est radical ! Tu auras toutes les femmes à tes pieds. Une semaine plus tard, les deux protagonistes se retrouvent sur la plage. Alors ? imparable mon truc, non ? Je ne comprends vraiment pas, répond l'autre, j'ai fait comme tu m'avais dit et je n'arrive toujours à rien ! Le [...] examine alors le [...] et lui demande : "Lève-toi un peu, pour voir ? Et il s'exclame :Mais non ! crétin ! pas derrière ! devant !
- Toute espèce d'hétérodoxie, aussi bien, peut faire l'objet de cette dérision qui conforte l'orthodoxie. On trouve dans la comédie d'Aristophane vide supra : chapitre 7.4 : Altération et altérité de la norme anthropologique : le recours de la dérision un florilège de cette hétérophobie qui entend cacophonie dans la langue du métèque (apparentée aux cris des volatiles - Paix, 681) et dénonce les murs privées sous les espèces des aberrations de la nature (Cavaliers, 364, 140 ; Paix, 11), dont voici deux variantes modernes :
Comment faire rentrer trois cents lusophones dans une 4L ?
T[u] mets Santos d[e]vant et Dos Santos d[e][r]iè[r]e...
Pourquoi les homosexuels ne se reproduisent-ils pas ?
C'est parce qu'ils manquent de sérieux et de conviction : quand deux homos sont ensemble, il y en a un qui fait le con et l'autre qui s'emmerde...
Le rire est communicatif et lon rit ensemble dun autre contre qui et grâce à qui se fait et se soude lunanimité et lunité des rieurs (soudure physique, solidarité qui sobserve, par exemple, quand un groupe denfants qui se moquent dun adulte, pouffant et se détournant, lun deux montrant du doigt, se forme en un cercle resserré, dos au ridicule). Rappel inversé des communs et de la koinè, cérémonie sociale de la réfection de lunité sociale et de la remise en ordre des ordres, le rire est lart de redécouvrir les fondements avec le plaisir de lenfance. Pour filer une image primitive, on pourrait dire que, de même que les cellules du corps sont histocompatibles, les antigènes tissulaires causant le rejet du corps étranger (et du greffon), de même, le rire immunitaire (de protection) du chatouillement enseignerait et réaffirmerait lunité corporelle, mais préparerait aussi (aux défauts de la contenance que sont les zones gélogènes) la constitution du super-organisme quest le groupe dont le rire commun sanctionne la socio-compatibilité des membres. Je ris : j'apprends le corps ; je ris : j'apprends le groupe ; je ris : j'apprends la vérité. Chorus (silencieux) des cellules : cnesthésie ; rire bruyant du chatouillement et de la culture : expérience des limites du corps (C'est bien moi !) et de la corporation (C'est bien vrai ! ...que c'est faux), apprentissage et réassurance des êtres sociaux que nous sommes, de la contenance et du quant à soi, de la vérité et de lerreur. Hyperesthésie plaisante de la ratification des limites. Les zones gélogènes, en effet, ont pour siège le refuge de notre intimité et les certitudes de nos intimes convictions, ces points sur lesquels nous sommes particulièrement chatouilleux, sourcilleux (infra : 12.8), susceptibles... et dont lagacement ou lirritation (inoffensifs) provoquent le rire.
Lamygdale réagit, ainsi quil a été rappelé plus haut, aux signaux de danger et de détresse. Et gère ce que nous appelons banalement les peurs instinctives : la phobie des serpents, par exemple. Avec, dailleurs, un système dual ocytocine-vasopressine dont la nature a récemment été mise en évidence (Huber et al. 2005). Elle assure sécurité et communication. La voie courte (supra) étant propre à ladministration des situations de surprise, elle anticipe aussi le sens vital des mots. Ainsi, une expérience conduite sur des patients épileptiques (le traitement de certaines formes dépilepsie justifie la pose délectrodes intracérébrales et constitue une voie daccès à la connaissance de cette région inférieure du lobe temporal) montre-t-elle que la valeur émotionnelle dun mot peut être perçue avant son sens. À la différence dun mot émotionnellement neutre, un mot connoté danger (e. g. le mot poison) affiché pendant 29 millisecondes au milieu dune série de signes dénués de sens (technique de lamorçage masqué) provoque une activité électrique de lamygdale. (Naccache et al. 2005) Quand il savère que la voie courte nétait pas la bonne : e. g. le tuyau darrosage pris pour un serpent ou le tigre empaillé introduit dans la réserve des chimpanzés, qui déclenche d'abord des cris de frayeur et de menace puis, quand il se révèle nêtre quun tigre de papier est bientôt réduit en charpie, chaque chimpanzé mettant un point dhonneur à venir donner le coup de pied de lâne au roi des animaux : triomphe romain.
Si donc il existe une continuité entre le rire provoqué par le chatouillement et le rire sémantique (ce que Joubert, par exemple, dans son chapitre : A savoir si cest un vray Ris, celuy du chatoulhement, récuse, sappuyant notamment sur Moyse, medecin Arabe), il faudrait voir dans le rire provoqué par le chatouillement le support physique (et le modèle neural) de la coopération (supra). Le chatouillement nest toléré que de familiers. Même consenti, toutefois, il provoque ce réflexe desquive, comme a pu lobserver Darwin à propos dun enfant (le sien) de sept jours. Cest ce qui peut expliquer son caractère insupportable quand il est insistant et répétitif. Or que le chatoulhement soit facheus, deplaisant et non agreable, comme et loccasion du vray Ris, note Joubert, plusieurs choses le confirment : mais ceci principalemant que nul veut etre chatoulhé. (op. cit. : 193 ; les italiques sont nôtres) Il déclare, quant à lui, redouter le chatouillement et lestime à grand injure et tort, il sen venger[oit] volontiers, si ce pouvoit faire honetemant. Cest en effet un grief mal, poursuit-il, quand on et contraint de landurer longuemant : dont il net fort etrange ce quon mha dit, dun jantil homme qui voulut donner un coup de pognard à un sien familier, qui le chatoulhoit trop : mais il neut pas la force, etant rompüe de ce ris, et un autre lui ota le pognard. (pp. 194-195) Banalement, le rire du chatouillement sanctionne une surprise maîtrisée, une intrusion venant dun proche. Au-delà de ce caractère ludique, la fonction pédagogique du chatouillement révèle une signification sociale.
C'est, nous l'avons dit, aux défauts de la cuirasse individuelle que se décompose l'individu et que se compose le groupe. La dialectique du chatouillement : oui et non, expérience des limites individuelles, contenance et débridement, amorce de l'incorporation au super-organisme qu'est le groupe, pourrait ainsi manifester le substrat éthologique, grégaire ou social, de la passion risoliere (Joubert : 39). Cette dialectique, en effet, est aussi celle du sujet dans ses rapports avec le groupe. Le sujet n'est rien sans cette appartenance au groupe et il doit pourtant prospérer en tant qu'individu, séparé. Le groupe, organisme à la fois omniprésent et absent, individuellement intériorisé et décliné, redevient physiquement manifeste, réactivé, régénéré à la faveur de procédures d'association, de réassurance et de complicité sociale. Spécifiquement dans le rire, conjoncturel (le rire spontané) ou rituel (la Comédie), quand l'individu ne se contient plus et (re)devient groupe. Le rire est banalement dit "contagieux", trouvant là sa principale fonction sociale. L'expérience commune du rire, qui met en uvre les ressources neuronales du "circuit de la récompense", comme la dopamine et l'acéthylcholine, mais aussi l'ocytocine, dite encore "hormone de l'attachement", révèle et conforte l'intelligence du groupe, l'esprit de corps.
"Plus on est de fous, plus on rit". La contagion, effet collatéral du rire, en révèle peut-être l'origine et la fonction première. De la "socialisation" par la "chatouille", plaisant apprentissage dyadique de la communication, au rire sémantique qui sanctionne le partage d'une même expertise, en passant par le rire "pour rien" qui exprime le plaisir d'être entre soi (à deux ou en groupe), la contagion du rire paraît souder sous une même peau les corps disjoints. Cette contagion, tout esprit critique suspendu, tout quant à soi ravalé, est réflexe et irrépressible. Plus on est de fous, plus les fou-rires explosent. Il y a une corrélation entre la baisse de vigilance, le rire et la fusion du groupe. L'alcool, qui fait tomber les préventions et les inhibitions, déchaîne le rire collectif de la compagnie des buveurs, secouée à l'unisson comme si elle ne faisait qu'un seul corps. Le principe moteur de ce corps temporairement chevillé par des blagues ou des situations de moins en moins drôles et de plus en plus lestes au fur et à mesure que la fête avance est foncièrement régressif. L'enrôlement organique de ce type de rire est inverse à celui de l'"esprit" (ainsi nommé parce qu'il ne flatte analytiquement que les neurones). Quand le rire reconstitue le groupe ainsi, l'ochlos prend vie et la sélection naturelle reprend ses droits. C'est ce rire provoqué par la différence (i. e. en réponse à la provocation de la différence) qui précède l'exclusion et l'exécution du bouc émissaire ou du mock-king.
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