4 Éléments d'Ethnographie Indienne (en cours) Champs : Anthropologie religieuse Ethnographie villageoise Route des Indes 3- Rues de Pondichéry 4 - Nobili et la "querelle des rites Malabares" |
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Présentation : Planches : Galeries : 1ère partie :
[Quelques-unes des notions ici abrégées ont été présentées dans le séminaire de mathématiques de l'ERMIT (Equipe Réunionnaise de Mathématiques et d'Informatique Théorique), le 4 décembre 2007.] *
"Il doit y avoir une science générale qui explique tout ce qu'il est possible de rechercher touchant l'ordre et la mesure, Introduction Au Tamil Nadu, fidèles à une tradition transmise de mère en fille, les femmes dessinent chaque matin sur le seuil de leur maison, avec de la farine de riz ou de la poudre colorée qu'elle laissent couler de leur main, à la façon du pertuis d'un sablier, des figures appelées kolam. "Pendant le mois néfaste précurseur du pongol, une espèce de sanniasy va de porte en porte vers les quatre heures du matin ; et, frappant sur une plaque sonore de bronze, il réveille ceux qui dorment, les avertit de se tenir sur leurs gardes, et de prendre les précautions nécessaires contre les influences malignes de ce maudit mois, en apaisant, par des adorations et des sacrifices, le dieu Siva, qui y préside. Dans cette intention, les femmes, tous les jours, vont à la porte de la maison, enduire de fiente de vache un espace de trois pieds en carré, sur lequel elles tracent plusieurs raies blanches avec de la farine de riz [...] Le pongol ou maha sankranty a toujours lieu au solstice d'hiver, époque où le grand astre ayant atteint le terme de sa course vers l'hémisphère austral, se rapproche du nord, et revient visiter les peuples de l'Inde." Quoi qu'il en soit, cette valeur de protection et de propitiation constitue l'une des significations le plus souvent développées quand on s'informe de la fonction des kolam.
Les motifs représentés sont associés à l'énergie cosmique, à ses parèdres ou à ses avatars. C'est une fleur de lotus, siège de Ganesh ; une étoile de Lakshmi, déesse de la prospérité ; c'est la représentation du son AUM, son originel contenant tous les sons ; le svastika dextrogyre, représentation du soleil montant (ou sénestrogyre représentation du soleil déclinant) ; c'est le point, symbole de l'infini quand il représente l'immersion dans le tout ; c'est la ligne, symbole aussi de l'infini quand elle contourne ou relie les points, figurant le cycle de la vie et des renaissances La couleur des motifs peut varier en fonction de la période de l'année. Au Bengale, les formes prennent les différentes couleurs du riz au cours de sa croissance. Comme les figures de danse ou les mandalas, les kolam sont dits représenter la force vitale, la sahkti.
Un informateur de Layard, décline ainsi, dans les années trente (1937 : 122-123), le protocole d'exécution du kolam : le lieu qui reçoit le dessin, le seuil ou la rue, est d'abord balayé et aspergé d'eau ; la ligne doit idéalement "courir" (sans interruption), requérant la maîtrise de l'écoulement de la poudre ; le kolam doit être exécuté avant l'aube ; les lignes, toujours de couleur blanche, ne comportent pas de branches ; le nombre de lignes est limité, idéalement le dessin est composé d'une seule ligne ; aucune précaution n'est prise pour préserver l'uvre qui est bientôt piétinée et effacée, la première personne à passer sur le kolam étant l'époux de la maîtresse de maison. Robert Challe, dans son Journal d'un Voyage fait aux Indes orientales (août 1690 - août 1691), relève ainsi ce souci de préserver et de nourrir toute vie : "Ce ne sont pas les hommes seuls qui profitent de la charité de ces peuples. Les insectes les plus immondes s'en ressentent aussi [...] Il n'y a point d'homme, si propre soit-il, qui ne trouve sur lui quelquefois de la vermine : on la tue partout ; mais ici, on ne tue rien, crainte de tuer l'âme de père, mère ou autre. Ils ont sur eux des boîtes faites exprès, où ils renferment toute cette vermine, & le deuxième jour au plus tard, ils la portent dans une espèce de grange fort basse ; &, par des trous qui sont en haut, & qui se bouchent par de petites planches qui servent de chute, ils y vident ce qu'ils ont renfermé dans leurs boîtes. Ces animaux sont encore vivants : ils leur assurent leur subsistance par l'exposition d'un Lascaris, qui se fait lui-même un point de religion et de dévotion de s'en laisser dévorer. Il entre le soir par un trou : il y passe la nuit ; & il en sort le matin, grossi, bouffi, ne voyant goutte, n'entendant rien, & ne pouvant se soutenir, en un mot sans figure humaine : & comme il reste quelquefois plus d'un mois sans pouvoir travailler, on lui donne une roupie pour récompenser sa charité." (II, p. 28-29).
Si la période du diwali ou celle de pongal voient fleurir des représentations plus élaborées, ce sont les mêmes principes de composition qui régissent la réalisation de ces uvres éphémères. Complexité avec économie de moyens : c'est dire que ces figures multiformes que les femmes exécutent quotidiennement en variant les motifs, révèlent, dans leur intention de se concilier la protection des dieux et de se protéger de l'infortune, en même temps que la conception religieuse que l'homme se fait de sa place dans le cosmos, les processus logiques fondamentaux la grammaire de l'esprit. La géométrisation des formes est en effet caractéristique du kolam, même figuratif. La dextérité manuelle sy double dune performance mathématique quand la réalisation de la figure est commandée par un mode opératoire strict (règles de réécriture, réalisation de cycles fermés...). Cette confrontation de lart et de la nature par lintelligence des formes ouvre un espace de rencontre entre lesthétique et la science. De la préhistoire à lépoque moderne, linterprétation et la réalisation des régularités géométriques ont fait lobjet de spéculations mêlant mystique et mathématique : spirales, labyrinthes, algorithmes, dont le chiffre est donné comme la clé daccès à une réalité cryptée et surnaturelle.
- Requérant : - Ils sont une purification et constituent une protection contre les puissances maléfiques :
Le kolam est polysémique puisque sa valeur de protection contre le mauvais il attire la prospérité sur la maisonnée. Sa performance révèle la qualité de la maîtresse du lieu : "Au lever du jour, le seuil de l'habitation ne peut rester vide. Si une épouse laisse son seuil nu, son foyer sera stérile" (Stridharmapaddhati, 3v. 5-6). "Si une femme marche sur le sol purifié, mais non marqué du signe auspicieux du svastika, elle perdra trois choses : sa santé, sa longévité et sa réputation (Stridharmapaddhati, 3v. 8-9) (cités par Julia Leslie, Roles and rituals for Hindu Women, Pinter Publishers, London, 1991, p. 111). C'est une offrande auspicieuse au jour qui commence et à Lakshmi, déesse de la prospérité domestique et de la fécondité. C'est aussi un signe de bienvenue pour l'hôte. Ainsi qu'il est exposé dans la page consacrée à l'architecture traditionnelle, la transition entre la maison et la rue, l'espace domestique et l'espace public, constitue un trait caractéristique de l'habitation tamoule. La façade du rez-de-chaussée de la maison est protégée par une véranda (talvaram), au toit en pente qui descend sur la rue. Cet espace couvert (tinnai) est meublé d'une banquette. Anticipant le seuil, le kolam est un témoin de la vie domestique et religieuse de la maison dans cet espace semi-public.
Figuration de dieux, de fleurs, d'objets, mandalas chargés de sens cosmique, mais aussi : compositions abstraites mettant en uvre des principes de construction plus ou moins complexes, les kolam se signalent par l'économie de leur exécution. Ce sont quelques règles de cette économie qui seront présentées ici.
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