|
1°) Le Tanguin,
poison dépreuve à Madagascar :
mode demploi
Une présentation en diaporama
Une première version de cette recherche a été présentée au colloque international "Culpabilité - culpabilités" organisé pour les XXèmes Journées du Droit par la Faculté de Droit de Limoges, du 4 au 7 octobre 2000.
Résumé
L'ordalie a pour principe de mettre en communication, à la faveur d'un intermédiaire investi à cette fin, le monde des hommes et le monde des puissances supra-naturelles et de suppléer ainsi aux imperfections de la justice humaine, notamment quand il s'agit de décider de la culpabilité ou de l'innocence d'un accusé. Le poison d'épreuve ici présenté, utilisé à Madagascar jusqu'au milieu du XIXème siècle, était ainsi administré principalement aux personnes qui étaient accusées de sorcellerie. Des informations recueillies à la fin du XIXème siècle et consignées dans trois ouvrages différents (le Manuscrit de l'ombiasy, l'Histoire des rois et les Coutumes malgaches) permettent d'entrer dans la logique de ce processus judiciaire. Des circonstances historiques particulières, l'unification de l'Imerina sous Andrianapoinimerina (1787-1810), montrent par ailleurs comment cette institution a pu constituer un moyen d'unification mystique du royaume et permettent d'appréhender quelle utilisation "politique" il a pu être fait de cette procédure. C'est donc le "principe officiel" de l'ordalie et son "principe officieux" (son éventuelle politisation) que les documents ici présentés offrent à la discussion.
Introduction
Le Tanguin est une noix toxique qui était utilisée comme poison dépreuve par les Malgaches des Hauts Plateaux centraux de Madagascar. Cest le fruit dun arbre qui pousse sur la côte Est de la Grande Ile et dont il existe une forme à la Réunion : la chronique judiciaire de la fin du siècle dernier révèle un cas d'empoisonnement par le Tanguin, dont a été victime le maître d'un employé malgache.
www.meemelink.com
Les échantillons que je présente ici viennent de lherboristerie traditionnelle du marché de Tananarive. Cette noix ne figure pas parmi les produits de consommation courante exposés à la vue des passants. On va la chercher dans une poche ou dans une boîte où elle est rangée. Quand on senquiert du Tanguin, il arrive qu'on vous demande si vous avez des problèmes avec la justice
On vous explique alors que lorsquon se présente devant un tribunal, on met une noix de Tanguin dans sa poche et quon est sûr davoir gain de cause. Le Tanguin reste donc associé à la manifestation de la vérité. On dit aussi que cest un moyen de se protéger des sorciers. Et l'on verra que cétait aussi traditionnellement sa principale fonction : démasquer les sorciers. Barguignant quelques noix pour la bonne cause (celle de cette communication), il nous fut signifié par la marchande qu'il n'était pas possible de descendre plus bas : car "il faut respecter le Tanguin"
Deux questions sont inévitables quand on parle dordalie :
1°) Celle du principe officiel de laction ordalique et
2°) celle du principe officieux de laction ordalique : qui est, pour nous, de savoir - incorrigibles incrédules que nous sommes - sil y a manipulation ou "trucage" du principe officiel.
A - Laction ordalique :
Comme un bon dessin vaut mieux quun long discours, je vais utiliser un pictogramme pour représenter le principe cosmologique dans lequel se développe laction ordalique. Lidéogramme chinois qui signifie roi (wang) sécrit en représentant trois traits horizontaux reliés par un trait vertical. Létymologie populaire de cet idéogramme explique que le roi est celui qui met en communication la terre, le monde des humains et le monde céleste. Le roi est un médium. Voilà la représentation traditionnelle de la justice et le Tanguin est, à sa manière, un tel médium.
Par opposition, jillustrerai la conception moderne de la justice par ce mot dun surréaliste belge : La question de lexistence de Dieu est un problème qui ne regarde que lui. Les hommes doivent se débrouiller entre eux et nont que des solutions profanes à mettre en uvre pour régler leurs problèmes. Cest la différence entre lastrologie et lastronomie : il ny a plus de communication entre les différents plans de lunivers. Cest aussi la différence entre la justice transcendante, la foudre des dieux, et la justice immanente si jentends par là la justice des hommes.
Lordalie est donc une épreuve judiciaire dont lissue, réputée dépendre dune puissance surnaturelle, établit la culpabilité ou linnocence dun individu quand, dans la généralité des cas, la justice des hommes se révèle impuissante à le faire. On peut distinguer des ordalies indirectes et des ordalies directes, selon que cest la simple menace de linvocation surnaturelle ou lutilisation effective dun intermédiaire divin qui dévoile la culpabilité. Dans le premier cas, lépreuve sapparente à un dispositif (parfois un stratagème) destiné à confondre le coupable par l'invocation de la justice transcendante ; dans le second, la mise en uvre de laction surnaturelle procède de lexposition à un danger naturel (poison, puissance naturelle, animal prédateur de lhomme ou venimeux
) auquel la protection surnaturelle permettra déchapper. Ainsi quand, à Madagascar, après avoir mélangé au rhum un peu de la terre du tombeau de lhomme quon vient dinhumer (ou le serment prenant à témoin les ancêtres, sotro vokaka), on prononce linvocation : Si celui qui est responsable de sa mort est parmi nous, quil meure en absorbant ce breuvage ! léventuel coupable se désigne dévidence en sexcluant de cette imprécation (et de ce toast) , cest une ordalie indirecte. De même, quand, dans le folklore européen, lauteur dun vol se découvre après quon ait demandé à tous les suspects de mettre la main dans une boîte magique, le noir ayant été fait dans la salle dordalie, supposée reconnaître celle du coupable et que, la boîte en cause étant remplie de farine, la main chapardeuse saffiche comme la seule à ne pouvoir montrer patte blanche... (ainsi encore de la Bouche de la vérité dans Roman Holiday, film de William Wyler de 1953, avec Gregory Peck et Audrey Hepburn, gueule de pierre dans laquelle on plonge la main et qui dévore celle des menteurs, ce qui permet au héros et à lacteur deffrayer et de séduire la belle, la séquence où on le voit la main prise par la gueule en cause nétant pas prévue dans le scénario
)
Une "bouche de la vérité" (de dénonciation) contre les magistrats corrompus :
Denontie secrete contro chi occultera gratie et officii. O colludera per
nasconder la vera rendita dessi. (Palazo Ducale, Venise)
Mais ce qui fait, pour nous, le caractère spectaculaire de lordalie, cest évidemment la confiance mise dans le jugement de Dieu, dans lintervention des puissances supranaturelles au cours du processus judiciaire. Cette confiance témoigne dune conception de la justice où cest la conformité de lhomme et du monde, révélée par la médiation dun élément naturel, qui fonde le droit. Cette caractéristique nous intéresse dautant plus, pourrait-on dire, que notre pratique du droit se fonde, elle, sur une rupture avec lordre surnaturel : Cest par le silence, écrit Jean Carbonnier, que le Code exprime son idéologie... Il ne dit rien de lÉglise et cela suffit pour établir la laïcité du droit civil, ce qui était en 1804 une innovation sans précédent. Quand le juge est un médiateur cosmique dans la représentation traditionnelle de la justice, il est pour nous un arbitre de la raison, le garant de ces règles que la loi des hommes a établies pour vivre en commun et qui ne laissent pas de place à lintervention surnaturelle.
Il faut donc, me semble-t-il, rappeler nettement ceci quand on parle dordalie : celle-ci prend place dans une représentation où lhomme fait partie du cosmos. Le roi, le juge, le poison dépreuve mettent en relation le monde des puissances et le monde des hommes. La modernité, je lai dit, se signalant évidemment par la rupture de cette liaison.
Le Tanguin est donc une noix toxique qui était utilisée comme poison dépreuve par les Merina sur les Hauts Plateaux de Madagascar. Le cas du Tanguin est intéressant dans la mesure où nous possédons des textes détaillés qui expliquent sa signification et son mode daction ordalique et que ces textes permettent de comprendre selon quelle conception de lordre du monde lépreuve judiciaire peut discriminer la culpabilité. De surcroît, des circonstances historiques particulières, lexpansion merina pendant le règne dAndrianapoinimerina (1787 - 1810), permettent aussi dappréhender lutilisation politique qui a pu en être faite. Cest sous règne en effet que ladministration du poison devint une institution minutieusement organisée.
Le mot "Tanguin" semble avoir pour racine le mot tanghena : vérité. Le Tanguin serait alors l'instrument de la vérité, sa fonction justifiant son appellation. (Une recherche de philologie historique permettrait sans doute de confirmer ou d'infirmer cette hypothèse selon lorigine géographique de létymon.)
B - Un peu de botanique
Larbre qui produit ce poison dépreuve est Cerbera venenifera Steud. (Apocynacées), nommé Tanghena en malgache et sa graine Kebona. Le Tanguin est encore utilisé dans la médecine populaire daujourdhui, à faible dose (la dose judiciaire était de deux noix râpées), pour ses vertus vomitives ou cardiotoniques. Cet arbre ne pousse pas sur les Hauts Plateaux. On le trouve, je lai dit, sur la côte Est de Madagascar et cest probablement au cours de leur migration de la côte vers les Hauts Plateaux que les Merina en ont éprouvé lutilisation.
www.illustratedgarden.org
Le Tanguin est un arbre à latex à fleurs blanches. Son fruit est une drupe à chair rosée, à péricarpe membraneux et dont le noyau fibreux contient une amande riche en huile. Les propriétés de cette amande sont dues à des principes cardioactifs de type strophantine, quon peut rapporter à ceux de la digitaline. À forte dose, cest un poison du cur. Le principe nauséeux de la noix de Tanguin, le spasme intestinal quelle provoque, est exploité en parallèle avec son principe toxique, puisque cest léventuel rejet de trois morceaux de peau de poule quon fait ingurgiter à linculpé avec le poison - il vomit généralement le poison avec les fragments de peau - qui décide de son innocence ou de sa culpabilité.
Plusieurs molécules toxiques ont été isolées dans les différentes parties botaniques de la plante. Le fruit et les graines renferment un mélange d'hétérosides cardiotoxiques très puissants, le cerbéroside (principalement dans le fruit vert), la cerbérine (dans le fruit mûr) qui est la mono-acétyl nérifoline [Iyer GV, Narendranath M. "A preliminary report on the neurological manifestations of Cerbera odallam poisoning". Indian J Med Res 1975 ; 63 : 312-4.] et l'odolline. Le latex contient principalement de la thévethine [Malathy K, Krishnamoorthy A. "Detection of Cerbera odallam by thin layer chromatography". J Chromatogr 1978 ; 152 : 592-4.] Les racines possèdent des propriétés antiprolifératives et antistrogéniques grâce à trois autres cardénolides : la 17-bêta-nériifoline, le 14-hydroxy-3-bêta-(3-O-méthyl-6-déoxy-alpha-L-rhamnosyl)-11-alpha,12-alpha-époxy'(5-bêta,14-bêta,17-bêtaH)-card-20,22-énolide et le 14-hydroxy-3-bêta-(3-O-méthyl-6-déoxy-alpha-L-glucopyranosyl)-11-alpha,12-alpha-époxy-(5-bêta,14-bêta,17-bétaH)-card-20,22-énolide [Chang LC, Gills JJ, Bhat KP, Luyengi L, Farnsworth NR, Pezzuto JM, Kinghorn AD. "Activity-guided isolation of constituents of Cerbera manghas with antiproliferative and antiestrogenic activities". Bioorg Med Chem Lett 2000 ; 10 : 2431-4]. (Recension dans : Y. Gaillard, M. Cheze, G. Pépin : "Intoxications humaines par les végétaux supérieurs : revue de la littérature", Annales de Biologie Clinique. Volume 59, Numéro 6, 764-5, Novembre - Décembre 2001, Article électronique)
C - Le manuscrit de lombiasy
Un manuscrit dont la connaissance est due à Alfred Grandidier (lauteur en est, dit-il sans autre précision, lun des derniers survivants des ombiasy [devins] de Ranavalona 1ère, qui régna de 1828 à 1861), rédigé en 1864 et 1865, apporte des informations - qui recoupent largement celles quon trouve dans les Tantara Andriana, présentées et commentées par Mondain et Chapus (1946), sur la philosophie et la mise en uvre de cette pratique (Rabearimanana, 1975).
Voici les usages, commence le texte, quand cest le souverain qui ordonne ladministration du Tanguin soit pour une accusation de sortilège, soit pour une révolte, ou si quelquun est accusé de sortilège, ne serait-ce que par un seul témoin. Laccusé doit subir lépreuve du Tanguin dans la maison où on le trouve, même si ce nest pas la sienne. Puis on laccuse en ces termes : Voici pourquoi le roi veut vous faire boire le Tanguin, pourquoi on vous accuse.
La première série de dispositions consiste à isoler la procédure daccusation du cours ordinaire des choses et à la placer sous linvocation, à labri de la lumière du jour, dun principe cryptique : Dabord, même si on lui fait boire le Tanguin en plein jour, on ferme la maison, on bouche les fentes pour quaucune lumière ne pénètre de lextérieur ; puis on éclaire la maison à laide dune petite lampe. Puis on cherche de leau prise sous terre et nayant pas vu le jour. Le manuscrit énumère ensuite les éléments nécessaires à ladministration du poison : deux petits poulets pour lépreuve préalable ; la peau dune poule dont on découpera trois morceaux, un récipient où laccusé devra vomir ; une spathe de bananier qui contiendra le Tanguin râpé ; un jeune plant de bananier dont sera extraite la sève mélangée au Tanguin râpé ; enfin une bouillie de farine et du riz.
La procédure ordalique elle-même consiste à faire avaler à laccusé, un à un, les trois morceaux de peau de poule, puis à lui administrer le Tanguin après avoir formulé une imprécation demandant au Tanguin de reconnaître le bien du mal dans le ventre de laccusé. On lui administre ensuite la bouillie jusquà ce quil vomisse les trois morceaux de peau de poule. Si laccusé reconnaît sa faute, on le laisse. Sil meurt, on le laisse aussi. Et sil survit, les trois morceaux de peau pris sur la poule ayant été rejetés, celles qui attendent dehors [entonnent] des prières...
On prend [donc] deux petits poulets pour lépreuve préalable [qui permet de tester lefficacité du poison]. On fait chercher aussi une poule que lon va tuer pour en retirer la peau, une nasse où celui qui boira le Tanguin doit vomir pour que lon retrouve les morceaux de peau de la poule. On prend en outre le bouquet dun bananier qui contiendra le Tanguin une fois râpé avec la râpe à Tanguin du prince qui administre le Tanguin ; car il a déjà une râpe à Tanguin quil a taillée en forme de grosse cuillère mais dont lintérieur est en dents-de-scie. On se procure aussi un jeune plant de bananier dont on extrait un peu de sève que lon mélange à leau servant à râper le Tanguin. Ensuite on prépare une bouillie de farine, on fait cuire un peu de riz [...] que laccusé mangera [...]. Une fois tout ceci rassemblé, on fait cuire la bouillie dans une grande marmite dans laquelle on verse beaucoup deau nayant pas vu le jour [...] Ceci fait, le prince qui administre le Tanguin se lève et laccusé avance un peu vers le sud, et on allume un petit feu devant lui. Laccusé passera par-dessus ce feu, de même que le Tanguin. Puis celui qui administre le Tanguin tient devant laccusé le Tanguin avec la lance à Tanguin, etc. (voir infra).
Lintérêt de ce manuscrit tient également dans la description de la fonction mystique attribuée à la substance ordalique. Le poison est invoqué et magnifié en ces termes : Entends, entends, entends, entends, écoute bien ô Manamango [esprit du Tanguin], tu es un uf rond, le remplaçant de Dieu, le porte-parole du Créateur, nayant pas dyeux, mais qui voit, nayant pas doreilles mais qui entend, nayant pas de bouche, mais dont on approuve les dires et les paroles, alors entends, écoute bien, ô Manamango. Entends, entends, entends, entends, écoute bien. Tu étais dans une contrée lointaine, aux quatre points cardinaux, au bord de la mer ; là où tu cherchais fortune, on ta cherché là-bas comme on cherche de largent, on ta cherché là-bas comme on cherche des perles, que ce soit un noble, un roturier ou un esclave qui ta cherché là-bas. On ta cherché ô Manamango pour être le porte-parole de Dieu, le remplaçant du Créateur, pour être le juge des nobles, pour être le juge du peuple, pour être un arbitre qui prononce le verdict, pour être juste et parfait, pour condamner les coupables et acquitter les innocents. Alors entends, écoute bien, ô Manamango.
Dans un deuxième temps, le texte expose la supériorité judiciaire du poison dépreuve sur la justice des hommes : Entends, entends, entends, entends, écoute bien ô Manamango, tu es venu de lEst, tu es monté dans ces régions où il y avait des nobles, où il y avait des souverains qui exerçaient leur domination. Mais quils soient les chefs de centaines ou de milliers de nobles, lorsquils rendaient la justice, ils le faisaient avec partialité, ils ont jugé à fleur de peau, ils ont jugé à la légère, ils se laissaient corrompre par largent et la richesse, ils ont remis en cause des jugements antérieurs [...] ils ont été incapables de juger.
Le Tanguin aurait dabord été administré à des animaux, à des poulets utilisés comme témoins ordaliques des accusés ou aux protagonistes dun procès. Il est admis aussi que cest sous le règne dAndrianapoinimerina et sur limpulsion de la caste des hommes libres, Tsimahafotsy, qui aspiraient à la sécurité dun royaume fort et organisé, que lépreuve devait prendre une signification nouvelle. LImerina était alors divisé en petits royaumes aux mains de potentats régnant, dit-on, par la sorcellerie. À partir de son territoire dAmbohimanga, Andrianapoinimerina conquit tout lImerina et en fit un royaume structuré sous son autorité. Se posant comme maître et seul détenteur du Tanguin : Je suis le maître du Tanguin et nul en dehors de moi ne peut le faire prendre, il créa des fonctions spéciales dévolues à ladministration et à la promotion de cette ordalie.
D - Le témoignage dun missionnaire en 1831
En 1831, un témoin oculaire, le révérend Freeman de la London Missionary Society, écrit une lettre sur le renouveau du poison dépreuve en Imerina sous le règne de Ranavalona 1ère qui accéda au trône après la mort de Radama (ce dernier ayant limité cette utilisation). Sont soumises au poison dépreuve les personnes soupçonnées de sorcellerie ou soupçonnées dêtre ensorcelées. Il a été utilisé aussi pour découvrir la culpabilité des personnes accusées des délits civils, vols avec effraction, meurtres, etc. Il est de même fréquemment employé pour régler les litiges sur les propriétés, les vols de peu dimportance, en ladministrant à des chiens désignés par les parties intéressées, et, naturellement, le propriétaire du chien tué par lépreuve est condamné aux peines prévues par la loi. En quelques régions de lîle la conviction est établie selon que la partie qui boit le Tanguin vit ou meurt ; si la dose entraîne la mort, la partie est déclarée coupable sans discussion ; si elle en réchappe son innocence est démontrée. Mais en Imerina où jai habité pendant quelque temps le Tanguin ne constitue lordalie que dans la mesure où il agit en tant que puissant vomitif. Voici comment il est utilisé. Laccusé, après avoir mangé du riz bouilli autant quil lui est possible, avale sans les mastiquer trois morceaux de la peau dun poulet, ayant chacun environ la largeur dune piastre. Il boit alors le liquide dépreuve, composé dune petite quantité de noix de Tanguin râpée mélangée dans du jus de banane. Le panozon-doha (celui qui prononce la malédiction ou imprécation) place alors sa main sur la tête de laccusé et prononce la formule dimprécation, appelant sur lui les plus affreuses malédictions sil est coupable. Aussitôt après on administre à laccusé une grande quantité deau de riz, qui a pour conséquence de provoquer des vomissements. Si, à lexamen, on trouve les trois morceaux de peau, tout est bien, laccusé est déclaré madio, propre, légalement et moralement innocent de laccusation. Mais sil en est autrement, le crime a mis sa tache, cette tache est indélébile, et la disgrâce encourue est irréparable.
Quelquefois, la nature vénéneuse du poison agit avec une si grande rapidité que laccusé meurt pendant lordalie. Si lépreuve a prouvé la culpabilité de laccusé, mais si néanmoins le Tanguin na pas entraîné la mort sur le champ, laccusé est généralement mis à mort par les assistants, un gros gourdin ou un pilon à riz étant utilisés comme instruments de lexécution. La cervelle de la malheureuse victime est écrasée sur place. La strangulation est quelquefois utilisée, comme me la rapporté un témoin oculaire dune scène où la malheureuse victime fut alors conduite à quelque distance, ou plutôt traînée dans une sorte de convoi funèbre avant dêtre tout à fait morte. En quelques cas, les accusés sont laissés tels quels au milieu des souffrances de lagonie, abandonnés pas tous, famille, amis, tous ! Les esclaves reconnus coupables sont généralement envoyés au loin, vendus dans des endroits où on ne connaît pas leur culpabilité. Mais les esclaves appartenant à un membre de la famille royale sont mis à mort.
Il était hautement agréable à tout esprit empreint dhumanité dêtre témoin du déclin dune telle coutume barbare pendant les dernières années du règne de Radama, le dernier roi éclairé et entreprenant du pays. Son successeur a cependant encouragé ou permis le renouveau de cette coutume, et la poussé jusquà une lamentable extension. Tous les principaux de son peuple, officiers, devins, jeteurs danathèmes et dautres, environ plusieurs centaines, ont été forcés de boire le Tanguin pendant ces derniers mois, et une vingtaine ont péri, fauchés en pleine santé et force. Leurs biens ont été confisqués, et leurs familles réduites à la misère et à la ruine [...] ...Je sais que vous avez été longtemps lami de Madagascar, conclut Freeman à lattention de son correspondant [...] aussi jai confiance que vous continuerez à appuyer tous les moyens possibles pour délivrer les cinq millions dhabitants de cette île de cruautés aussi révoltantes, et pour les élever à la joie des bienfaits de la civilisation et du christianisme...
E - Le Tanguin dans lHistoire de rois (Tantaranny Andriana) du Père Callet, et les Coutumes malgaches (Fomba Malagasy) de Cousins
Les informations du manuscrit de lombiasy, cela na rien pour étonner, puisent aux mêmes sources que les Tantaranny Andriana. Quand les formules ne se répondent pas mot pour mot, lidée est la même et le scénario identique. Lombiasy émarge évidemment à la même école que les informateurs de Callet et Cousins. La compilation des informations sur le Tanguin puisées dans les Tantaranny Andriana et les Fomba Malagasy, par G. S. Chapus et G. Mondain (1946), apporte souvent des précisions supplémentaires. Un récit des Tantaranny Andriana attribue ainsi la révélation du Tanguin à la divinité à laquelle on rapporte la plupart des pratiques divinatoires, Ranakandriana. La première épreuve du Tanguin que pratiquèrent les ancêtres fut celle par laquelle on ladministra aux poulets ; on ne le fit pas prendre aux gens mais aux poulets. Quelque affaire quon entreprît, on procédait sur un poulet à lépreuve du Tanguin en invoquant Dieu. Si laffaire devait prospérer, le poulet vivait. Sil mourait, on ne faisait rien, et sil vivait, on sy mettait [...] Si lon devait donner lassaut à quelque localité, on procédait à une épreuve sur un poulet avant dattaquer [...] Ainsi opérait le roi pour agrandir ses États. (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 160) Cet usage divinatoire débouche naturellement sur la pratique qui consistait à administrer le Tanguin à des chiens, lun représentant laccusé, lautre laccusateur. On prononce linvocation suivante : Entends, entends, comprends-moi bien ô toi Rainimanamango. Te voilà maintenant dans lestomac du chien, substitut des yeux, de la vie, des mains, des pieds et des oreilles de laccusé. Oui, ce chien dont tu habites lintérieur est comme celui quil représente. Si tu vois que laccusé nest pas coupable, mais odieusement calomnié, que ce chien vive, que cet animal représentant de laccusé, qui a pieds et mains comme lui, soit rapidement rendu à la vie ; et reviens par la porte même par laquelle tu es entré en lui. Mais si tu vois que laccusé est vraiment coupable, tue ce chien dont les yeux, la vie, les pieds, les mains et les oreilles tiennent la place des siens ; oui, tue-le sans délai, détruis-le sur le champ, fais éclater son cur, déchire-le et fais-le mourir en un instant, ô Rainimanamango.
La mention de ladministration du Tanguin à des humains est associée au règne dAndrianjaka (1610-1630) et à des litiges et des procès que les gens narrivaient pas à régler entre eux. Cest sous le règne dAndrianapoinimerina que linstitution du Tanguin prend corps. Tantaranny Andriana, p. 112 : Sous Andrianapoinimerina les idées sur le Tanguin et son essai se développèrent. Ladministration du Tanguin au poulet, courante auparavant chez les ancêtres, fut utilisée par Andrianapoinimerina pour unifier son royaume. Lhabilitation mystique de la noix était vérifiée sur un poulet, ce qui permettait de constater son effet en réveillant lesprit caché dans la noix. On sadresse à cet esprit, dont le nom Ramanamango, évoque la perfection (G. S. Chapus et G. Mondain) en ces termes : Cest un uf ceci, ô Manamango, et il est devenu poulet ; engendré par un coq et né dune poule, il crie quand le jour paraît et court rapidement dès le matin ; il sait distinguer le jour et reconnaître la nuit. Si donc vous savez juger suivant la vérité, votre sentence aujourdhui ne nous trompera pas. Que leau soit insipide, tuez-le ; quelle soit bien chargée, tuez-le ; oui, entraînez la mort de ce petit poulet ; car il est un essai pour faire périr, pour montrer que vous nêtes pas un Tanguin indulgent à tout, ô Manamango. Si donc vous ne voulez pas tuer les justes, mais effectivement condamner les coupables, ô Manamango, faites périr ce petit poulet. Après ce premier essai sur un poulet dont la mort a été demandée, on soumet à lépreuve un second poulet dont on demande le maintien en vie en disant : Ce nest pas par haine quon a fait périr lun et ce nest pas par affection quon veut faire vivre celui-ci [...] cest un animal dessai à laisser vivre.
La codification de lépreuve par Andrianapoinimerina est décrite en ces termes dans les Tantaranny Andriana (p. 831) : Voici ce que je vous déclare, ô mes sujets. Dans ce pays cétait le gouvernement de la multitude ; mais maintenant Andriamanitra me la donné. Autrefois tous les gens agissaient à leur guise. Je ne le permettrai plus, mais jy veux mettre une barrière. Jusquici, ajouta-t-il, des hommes, les Tahiamanangaona avaient des amulettes malfaisantes : ils faisaient monter leau au village par un mortier qui marchait tout seul [...] car il est des choses quon ne doit plus voir dans le pays, amulettes malfaisantes et sorcellerie [...] jai trouvé une voie de justice dans le tangena ; par lui on découvrira les sorciers, les possesseurs damulettes malfaisantes, de charmes damour, les menteurs et les gens sincères.
www.wnsstamps.ch
Linstitution du Tanguin par Andrianapoinimerina saccompagna de protestations de fidélité au roi dont les démonstrations marquèrent les esprits et contribuèrent à renforcer le caractère dimpartialité de lépreuve. Selon la narration des Tantaranny Andriana, le conseiller du roi, Hagamainty, déclara devant le peuple : Sil y a vraiment un juge qui permette de reconnaître les coupables et les innocents, quon nous juge tous immédiatement. Nous vous remercions de la paix nouvelle que vous apportez par ce don du Tanguin. Alors, le chef du clan des Tsimahafotsy, allié d'Andrianapoinimerina proposa que les siens se soumettent en premier à lépreuve : Nous sommes les pères de la population [...] ainsi vous éprouverez vos propres serviteurs. On fit ainsi et certains Tsimahafotsy ne survécurent pas à ladministration du poison. Les gens du palais se soumirent aussi à lépreuve. Et Ampodiaina, particulièrement apprécié du souverain, succomba. Ce qui démontra au peuple le caractère sacré du poison. (Tantaranny Andriana, p. 832)
Faire du Tanguin, sous la responsabilité du roi, le seul moyen mystique de gouvernement, cela supposait donc de combattre la puissance occulte détenue par les fabricants de charmes privés. Andrianapoinimerina interdit en conséquence un certain nombre de charmes en mesure de concurrencer le pouvoir royal, mais aussi de troubler lordre public. En décrétant le monopole du Tanguin, de sa récolte, de sa détention et de son administration, il réalisait ainsi la centralisation religieuse du royaume en quelque sorte, mettant ses propres fétiches sous la protection du Tanguin. Le Tanguin devient le symbole et linstrument de lordre royal : Pour éviter toute dispute, dit le roi, jai institué la brasse, lempan et le pied... Sept pieds et sept empans font une brasse. Si vous vous querellez encore, dans ces conditions, vous serez manohi-drano, en lutte ouverte contre le Tanguin. On voit que le Tanguin se révèle l'instrument mystique de l'unification économique, administrative et politique du royaume.
À la rubrique Andrianapoinimerina envoie chercher le Tanguin, on apprend la solennité mise à la récolte des graines sacrées. Andrianapoinimerina adressa à la population une allocution dans laquelle il lui dit : ... 250 hommes chez les Aravadrano partiront et le nombre des chefs sera de 50 ; je vous fais savoir ceux qui partiront et vous en indique le nombre : 300, les chefs compris [...] Les mpanozon-doha (ceux qui administrent le Tanguin) vous accompagneront, au nombre de deux et voici les instructions que je leur donne : quand vous aurez trouvé du Tanguin, vous les mpanozon-doha que jenvoie, faites-le prendre à des oiseaux. Si les oiseaux survivent rapportez les graines et sils meurent, jetez-les [...] Telles sont les instructions que je vous donne, observez-les scrupuleusement ; car si jenvoie chercher du Tanguin, cest pour quil me permette de veiller sur vos femmes, sur vos enfants et sur vos personnes [...] Je vous accorde un délai de deux mois pour revenir à Tananarivo.
Un vieillard déclare à ce propos : Cest dans la forêt de lEst et celle du Nord que se trouve le Tanguin et que Dieu lest allé cherché. Cest un arbre à beaucoup de branches et cest le fruit quon prend. Lintérieur du fruit du Tanguin ressemble à celui de la pêche ; il est dur et il faut une lance pour le briser et en extraire lamande quil contient à son tour : cest là le jugement quon fait boire aux gens : ceux qui survivent sont justifiés ; ceux qui meurent sont convaincus de sorcellerie. On ne prend toutefois que les graines tombées : on ne les détache pas vertes, car Andrianapoinimerina avait déclaré : Ne prenez pas du fruit qui ne soit pas tombé, mais seulement celui qui est à terre : Apportez celui qui veut bien venir [...] Lécorce du jugement (le noyau qui enveloppe lamande du Tanguin) nest pas mortelle : on en fait un remède contre les maladies et contre la sorcellerie. Il faut le demander, déclarait le vieillard, au juge qui la garde.
F - Le Tanguin dans le code de procédure pénale
Les Fomba Malagasy (p. 91) décrivent ainsi la manière de procéder à lépreuve. Il ny avait aucun édifice officiel réservé à cet usage. On faisait donc vider une case quelconque. On faisait enlever tout ce qui se trouvait dans la maison, jusquaux nattes. On y plaçait cinq trépieds au sud du foyer pour y faire cuire leau de riz que lon donnait à boire au patient, juste après labsorption du Tanguin. Devant la place où devait sasseoir linculpé, on creusait deux trous, un à droite où l'on enfonçait un grand panier à pêche devant recevoir les matières vomies par la victime, un autre à gauche, celui-ci relié au premier par un canal afin dy ramener ce qui en déborderait. [...] On avait besoin de plusieurs objets faisant partie du rituel consacré. Le Tanguin devait être placé dans une sorte de cuillère faite dun morceau décorce de bananier. Pour le test opéré sur les poulets, il fallait préparer un petit entonnoir spécial en enroulant une feuille dune plante appelée famoa. Il fallait également une poule bien grasse pour y découper les morceaux de peau à faire avaler au patient (des fragments provenant dune poule maigre auraient infailliblement, paraît-il, entraîné de fatales conséquences en se collant à la peau du patient). On devait enfin se procurer de la farine de riz et de leau fraîchement tirée de la source.
Dans la case, celui qui doit subir lépreuve a été complètement dépouillé de ses vêtements. Assis sur un coussinet, les jambes allongées, et tourné dans la direction de lEst, il attend patiemment la suite des opérations qui seront assez longues. Il y avait dabord une proclamation faite par landriambaventy qui a au préalable lavé le Tanguin du côté nord du foyer, place dhonneur dans toute habitation malgache (Tantaranny Andriana, p. 369 : Le côté nord est la tête du foyer : cest le seul côté où il soit interdit dutiliser le feu. Attiser par le nord faisait mourir les gens prématurément et périr aussi la volaille, empêchait dacquérir des biens, de monter en grade ou de se disculper lors de lépreuve du Tanguin).
On procédait à une sorte de préparation des voies digestives du patient en lui faisant mâcher un morceau de courge séchée mêlée à de leau de riz épaisse, ceci, explique le conteur des Fomba Malagasy afin que le Tanguin ne glisse pas trop vite dans lestomac du patient. Cest alors seulement quon fait prendre le poison. (On note ici une divergence entre les Tantaranny Andriana les Fomba Malagasy quant à lordre selon lequel on faisait avaler les morceaux de peau de poule, avant ou après le poison.)
Le poison avalé, landriandahy commence les imprécations. Entendez, écoutez, ô Manamango, vous êtes maintenant parvenu jusquà son ventre ! le voyez-vous car vous êtes maintenant mêlé à lui et à ses os : sil a ensorcelé, mettez-le à mort ! que sa vie sachève ! puisse-t-il mourir ! et surtout sil a déclaré : moi je ne meurs pas du Tanguin : sil agit de la sorte mettez-le à mort ... Sil nest pas coupable de tout cela, faites-le vivre et il vivra...
Autre imprécation (proche de ce quon peut lire dans le Manuscrit de l'ombiasy) : Entendez, entendez, entendez, écoutez bien ô vous Ramanamango ; vous êtes un uf rond ; vous navez pas le trou doreille et cependant vous entendez, vous navez pas dyeux et pourtant vous voyez clair ; vous navez pas de bouche et cependant on approuve vos paroles ; aussi entendez-moi, écoutez-moi bien. Cest dun pays lointain quon vous a fait venir ; quon vous a fait venir comme largent, quon vous a ramassé comme des perles ; vous un fruit quon a ramassé et quon a échangé contre une fortune. On est allé vous chercher dans un pays lointain et lon a fait de vous larbitre de lesprit. Vous êtes le remplaçant de Dieu, représentant du Créateur, ô Manamango, pour condamner les coupables et redresser ceux qui sont droits, ô Manamango. Vous êtes monté dans ce pays que constitue lImerina ; quand nous étions soumis aux nobles Zanadralambo et quils rendaient des jugements, ils agissaient avec la crainte des hommes, ils se montraient par trop indulgents, ou affirmaient que ce qui était fait était bien fait ; ils jugeaient daprès lextérieur de la peau (par lapparence) ; ils se laissaient gagner par un cadeau dargent ; ils se laissaient gagner par celui dune fortune ; et il ny avait pas moyen de régler des affaires de la sorte ; quant à vous, cest vous le pouvoir suprême, ce sont vos paroles quon accepte, ô Manamango, et celui que tu condamnes, nous le condamnons, celui que tu disculpes, nous le disculpons, nous les hommes ô Manamango.
Dans certaines occasions, lépreuve concernait un grand nombre de personnes, elle était alors appelée tavibe (littéralement : la grande cuvette). On lit dans les Tantaranny Andriana (page 834) (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 186) quon administrait le poison aux gens dun village ou dune région si un envoyé du roi avait été ensorcelé. Les mêmes mesures étaient prises quand un personnage important mourait. La population au milieu de laquelle avait vécu le défunt devait se disculper de tout soupçon de maléfice à son égard en prenant le poison. On faisait prendre aussi le Tanguin aux habitants dun village quand ce dernier avait mauvaise réputation, explique le même passage des Tantara. Mais ce qui occasionnait avant tout cette administration générale du Tanguin cétait ou bien un déplacement projeté du roi qui ordonnait, suivant lexpression consacrée, de tuer les rats tout au long du chemin quil pensait parcourir, cest-à-dire dexterminer tous les suspects, ou bien la circoncision en bloc des enfants dune région.
Lorsque la population va opérer la circoncision, Andrianapoinimerina déclare : Je vais procéder à des sondages ; je vais faire prendre le Tanguin avant la circoncision, de peur que les méchantes gens ne fassent du mal à vos enfants et quil ny ait parmi eux beaucoup de décès. Je vous accorde un délai de deux mois pour prendre le Tanguin. À lexpiration de ce délai nous nous occuperons de laffaire, vous, mes sujets, et moi, car je vais faire circoncire vos enfants pour quils soient grands ; nous opérerons quand lépreuve sera terminée. Nagissez pas par haine car il y aura encore des mariages et des naissances ; il faut craindre que le retour du mal ne vous atteigne et ne frappe vos femmes et vos enfants ; aussi veillez soigneusement à la vérité ; puisse le bien accompli revenir sur celui qui le fait et le mal accompli lier son auteur.
Dans le cas du tavibe, tous les gens du village devaient sassocier au serment fait à la grande porte dentrée. Daprès le début de la page 836 des Tantaranny Andriana, on déclarait : En prêtant serment nous aidons à la recherche des sorciers et de ceux qui ne le sont pas. Il ne sagit pas de dire Je déteste ou Je naime pas. Nous tous ici, petits et grands, nous répétons : Puissent les os du menteur être dispersés ; puisse-t-il mourir sans enfant ; puisse-t-il crever comme ce mouton que voici, vaincu par ce serment que nous faisons à la porte ; car cest ici quon sort et ici quon entre.
La cérémonie une fois terminée, tous se dispersent et rentrent chez eux, après avoir cependant choisi auparavant cinq ou sept hommes de réputation incontestée quon désigne sous le nom dolo manga (gens purs comme le ciel). Ces représentants auront comme tâche de recueillir les dénonciations portées contre les suspects par leurs concitoyens. Daprès les Tantaranny Andriana, on les appelle aussi des greniers à resserrer les votes. Ils sétablissent dans des endroits assez distants et visibles. Peu à peu, tous les habitants passent devant eux et dénoncent ceux quils prétendent avoir commettre un acte de sorcellerie en mettant une pierre dans la main de celui qui reçoit les votes. Les pierres concernant le même individu sont mises ensemble.
[...] Le chef des olo-manga présente son rapport qui consiste à présenter lun après lautre le groupe de pierres concernant un accusé contre lequel trois témoins au moins se sont déclarés. Le dépositaire des pierres interroge à nouveau les accusateurs : Voici, dit-il, les pierres relatives à un tel, accusé davoir pris ses ébats avec les chats sauvages, dêtre sorti la nuit la tête couverte de son lamba ou davoir causé la maladie de ses voisins ; maintenez-vous tous vos charges contre lui ? Si les déclarations sont confirmées, celui qui en fait lobjet devra subir lépreuve.
Quand le rapport sur les votes est fini, le chef des olo-manga congédie les gens en disant : Que chacun retourne chez lui et garde du feu sous la cendre" ? La nuit est déjà fort avancée et les gens très excités ne dorment pas. Cest aussi que vers minuit on procédera à lappel aux portes des suspects. Les olo-manga vont aux demeures de tous ceux que les accusations concordantes de leurs concitoyens ont indiqués comme susceptibles de se livrer à des actes de sorcellerie. En montant au village, ils ne cessent de crier la parole consacrée : Sao babay, izay voa aza tezitra (Toute montagne est pleine dembûches ; que ceux qui sont atteints ne se mettent pas en colère). En entendant ces mots chacun tremble deffroi dans le village et rallume le feu caché sous la cendre, tout en couvrant la flamme dune marmite pour que rien ne se voie au dehors. Mais en arrivant à la porte dun des suspects, les olo-manga la frappent avec une pierre et crient : Soufflez sur votre feu, Ranona, car vous êtes sorcier ; vous avez lancé vos maléfices contre le roi, contre le peuple, contre des enfants, contre des femmes, contre des animaux.
G - Le principe officieux daction du Tanguin
Le fléau du Tanguin dont parle Ellis apparaît quand cest, selon lui, un dixième de la population qui est amené à prendre du Tanguin au cours de son existence (sous Ranavalona 1ère). À propos de la moindre sortie de la reine, on procédait à ce quon appelait le nettoyage des routes et à lextermination des rats. On en faisait prendre à tous ceux que désignait la malignité publique. En accusant on risquait évidemment une forte amende, mais cela pouvait valoir une partie des biens de laccusé...
www.wnsstamps.ch
Il y avait vraisemblablement des accommodements avec le Tanguin il en est bien avec le ciel. On pouvait ainsi choisir des fruits non encore parvenus à maturité, des noyaux de couleur pâle, moins vénéneux que les autres, varier les dosages, etc. On pouvait acheter les préposés au poison... Limprécation était vraisemblablement plus ou moins longue selon le sentiment que laccusateur pouvait avoir (ou voulait donner) de la culpabilité du patient, car cest seulement limprécation achevée quon faisait ingurgiter au patient leau de riz épaisse qui devait aider aux vomissements. Sil était dans lidée de lexécuteur et de ses assistants, lit-on dans les Fomba malagasy, de donner une issue fatale à lépreuve, voici comment ils sy prenaient (p. 183).
On distinguait plusieurs cas dissue fatale.
Il y avait dabord ce quon désignait par les termes mamoly landy : le patient, violemment éprouvé par le poison sentait ses doigts se recroqueviller et avait de la peine à saisir lustensile quon lui passait. Cétait un signe funeste ; lexécuteur nhésitait pas à achever aussitôt la victime, soit en létranglant, soit en lassommant à coups de pilon à riz.
Le même sort attendait le malheureux qui, surpris par lenvie de vomir, repoussait une des assiettes que les aides ne cessaient de lui présenter...
Il pouvait arriver quun inculpé luttât tout un jour pour parvenir à rejeter les trois peaux fatidiques, vomissant presque constamment, mais sans résultat ; à la fin, absolument épuisé, il renonçait à boire davantage deau de riz. Pour cela même, il était supposé vaincu, cest-à-dire coupable, et tombait immédiatement sous les coups de lexécuteur.
Dautres qui avaient réellement accompli des actes de sorcellerie et nié jusque-là se décidaient à avouer, sans force devant les tortures endurées. On déclarait quils ne savaient plus ce quils disaient. Le lacet ou le pilon à riz mettait aussitôt un terme à leurs révélations.
Sans doute a-t-on pu dire quAndrianapoinimerina avait fait du Tanguin un moyen de police. La réalité de cette instrumentalisation dune épreuve mystique pose question. Quand Andrianapoinimerina déclare : Je fais du Tanguin le révélateur de mon royaume et je nignore pas ce quont fait mes douze prédécesseurs : mes ancêtres aussi ont pris celui-là comme rassembleur et révélateur du royaume, suivant lordre dAndriamanitra lui-même (Tantaranny Andriana, p. 765), il se pose comme le maître des charmes. La référence aux Tahiamanangaona et à leurs amulettes malfaisantes vise un clan qui sétait opposé à son expansion sur lImerina. Les ennemis dAndrianapoinimerina ce sont bien entendu les Tahiamanangaona, mais bien davantage, pourrait-on dire, leurs fétiches. Je marrangerai, dit-il (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 166) pour que ces gens ne puissent plus faire croire à leur pouvoir, et je briserai tous ceux qui voudraient les imiter. Cela sexprime par la recherche systématique et obsessionnelle de la sorcellerie... Andrianapoinimerina dit au peuple : Au sujet des charmes maléfiques et de la sorcellerie, voici les lois dont je tiens à vous parler : je désire faire boire le Tanguin aux coupables, mais je veux dabord vous en entretenir, vous mes sujets [...] Si nous procédons à cette épreuve, ce sera la sécurité pour vous ; les sorciers et les producteurs de charmes maléfiques disparaîtront ; et quant à moi, jestime quil est bon duser du Tanguin. La lutte politique sexprime sans doute par le choc des armes, mais aussi dans le choc, si lon peut dire, des charmes. Instrument de l'ordre public, mais non pas au sens de "moyen de police" d'un État profane : "moyen de police", sans doute, mais d'un État mystique, vulnérable aux puissances maléfiques.
Une déclaration dAndrianapoinimerina montre, non pas un souverain jouant de la crédulité de ses sujets, mais parfaitement persuadé de la réalité des charmes de ses adversaires et entrant dans une sorte de rage pour écraser ce qu'il se représente, non comme une opposition politique passible de ses armées, mais comme une réalité qui provoque chez lui la répulsion, le dégoût et une explosion de haine. Hagamainty (son conseiller) demande ce quil faut faire contre ceux qui auraient des charmes supérieurs à ceux du Tanguin : Il faut mettre à mort aussitôt ceux quon pourrait supposer susceptibles de faire obstacle à lemploi du Tanguin : on les étranglera. Et il ajoute : si quelquun auquel on fait prendre deux fois la drogue est accusé par le peuple dêtre réfractaire au Tanguin, quon recommence lépreuve une dernière fois avec des imprécations violentes en disant : quil soit réfractaire ou non, quil meure ! Sils résistent encore à lépreuve, cest quils sont en effet réfractaires ; alors étranglez-les, mettez-les la tête en bas dans un silo à riz où lon versera de leau bouillante. Et sils vivent encore, transgressez tous leurs tabous ; mettez des poils de chien noir, de lambiaty, du chiendent, de la cendre, et jetez tout cela dans le silo avec de leau bouillante ; puis, sils ne sont pas encore morts, découpez-les en morceaux, jetez une partie au courant de leau, et le reste aux chiens. (G. S. Chapus et G. Mondain, p. 172)
Quoi quil en soit, la conception du mode daction du poison dépreuve révèle une administration de la justice conforme à lordre supra-humain. Le poison fait alors office de médiateur entre la divinité et lorganisation judiciaire. Dans une juridiction incertaine, nécessairement imparfaite parce quadministrée par la loi des hommes (La justice arrive dun pied boiteux dit Horace), lépreuve judiciaire introduit des indices divins qui permettent, en discriminant le pur de limpur (laccusé lavé de linculpation est dit madio : propre), la manifestation de la vérité. Un informateur du Père Callet à propos de lordalie au fer rouge : Ce nest pas par méchanceté envers cet homme, mais pour reconnaître votre force ô Dieu, car votre sagesse est au-dessus de notre connaissance ; et si cest un homme de bien, cela ne lui fera aucun mal. La manière dont on se détournait du coupable, selon le témoignage de Freeman, montre que celui-ci, loin de susciter un sentiment didentification (pour ne pas parler de compassion), était aussitôt perçu comme une dangereuse souillure dont il fallait aussitôt délivrer la communauté. Portant une menace contagieuse de désorganisation des ordres, il devait être immédiatement annihilé.
Ce que paraît montrer aussi la manière dont un inculpé, lavé de laccusation par le poison, était réintégré parmi les siens. Cette réintégration donnait lieu à de véritables cérémonies. On allait consulter lastrologue pour savoir le meilleur jour à prendre en vue de la rentrée officielle et solennelle de lacquitté dans sa demeure. On organisait alors une véritable procession désignée daprès les Fomba Malagasy par le terme de mampakatra mpinona (la remontée de celui à qui on a fait boire le Tanguin). On remarquera, notent Chapus et Mondain, que ce terme de mampakatra est également employé pour désigner la réception de la fiancée le jour du mariage. Il y avait bien reprise, par laccusé délivré, de ses relations primitives avec les siens et avec la société. On lornait dailleurs de ses plus beaux habits : on lui mettait dans les mains un bouquet de fleurs de nénuphars parfois appelée les fleurs que le feu ne saurait atteindre et il montait, entouré de tout un cortège damis et de parents portant aussi de ces mêmes fleurs attachées au bout de lherbe sacrée (tsontsoraka). Mais avant de se mettre en route, il fallait attendre lachèvement dune autre cérémonie, celle de la purification de lex-prévenu.
Voici ce quil en est rapporté à la page 416 des Tantaranny Andriana : Si celui auquel on fait subir lépreuve survit, on le baigne avec de leau lustrale de la corne blanche, qui est un des principaux instruments des pratiques habituelles des gardiens de fétiches. Dans cette eau, on a mis des herbes tsiriry et hahibita. Ce bain se fait soit un lundi, soit un mercredi, jours au destin puissant. On apporte de leau de la corne blanche, on y ajoute les plantes et on en asperge celui qui a bu le Tanguin ainsi que tout le chemin quil doit prendre pour rentrer chez lui [...] Avant larrivée du cortège au village, on a tué un buf ce qui est à la fois un acte de réjouissance et un sacrifice de purification [...] La viande des bufs sacrifiés en cette occasion est dite henan-doza (viande du malheur ; les gardiens didoles et les nobles se gardent den manger, car cela leur porterait malheur).
Il est significatif, dans les invocations des Fomba Malagasy, que ce soit exclusivement le crime de sorcellerie qui soit explicitement recherché par ladministration du Tanguin. Si cet homme a un charme capable de faire mourir une personne, susceptible densorceler le Roi ou densorceler le peuple, densorceler des hommes ou densorceler des femmes, densorceler des enfants ou la fortune des gens, sil a un charme capable de provoquer la mort, vous entrerez dans sa bouche et descendrez dans ses entrailles : faites-le périr vite, tuez-le promptement éteignez le souffle de sa vie ; faites de lui un cadavre sil ensorcelle et quil ne vive pas. Sil ensorcelle et le nie très fort ; sil compte sur ses amulettes toutes-puissantes, sil compte sur lantidote pour vous neutraliser ; sil sattend à être aidé par un contrepoison ; mais vous nadmettez pas lefficacité de cela ô Manamango ; mettez-le à mort, sil ensorcelle, ne le laissez pas vivre ô Manamango.
Et la sorcellerie, à lexclusion des autres crimes, fussent-ils aussi graves que le crime dinceste, par exemple, ainsi quil est explicitement développé. Je vais distinguer, je vais préciser, ô Manamango.... comme il habitait avec des gens, il a pu commettre des fautes, et a encouru des blâmes vis-à-vis des morts et des reproches vis-à-vis des vivants, mais si ce ne sont là que des blâmes, un simple sujet de reproche, sil nest pas coupable de sorcellerie, faites-le vivre ô Manamango. Il se peut quil ait couché avec des personnes avec qui il ne devait pas avoir de rapports et qui devaient être taboues pour lui, il se peut quil lait su et quil lait fait délibérément, ô Manamango; mais si cest le cas, sil ny a pas de sorcellerie, accordez-lui la vie. Il se peut quil ait compté être dans un pays caché ou quil ait compté sur le gens qui étaient près de lui ou quil se soit simplement nourri des biens du roi ou de ceux du peuple ; mais ce nest pas cela que vous retiendrez ô Manamango, car ce sont là seulement des contestations pour acquérir des biens ; mais si ce sont là des fautes graves et un sujet de reproche, vous ne retenez pas ces cas ô Manamango ; et sil nest pas coupable de sorcellerie, faites-le vivre, ô Manamango [
] Il se peut quil ait simplement fait un vu à des Vazimba, ou quil en ait fait à un sorcier, quil ait promis denduire une pierre de graisse et de faire un don en argent, puis quil nait pas fait de don ou rempli sa promesse ; ce serait donc là le malheur qui le frappe, ô Manamango, et non la sorcellerie [
] ce serait pour le seul crime de sorcellerie que vous le feriez périr ô Manamango [...] Il se peut quil ait pris seulement un charme à lusage des taureaux, ou rien de plus quune amulette contre la grêle, ou une contre la maladie des petits enfants, car il voudrait voir les siens dodus ; mais sil ny a pas ajouté, ô Manamango la sorcellerie qui cause la mort, accordez-lui la vie. Je vais distinguer, je vais préciser... Il a pu y avoir des gouttières dans sa maison en été ; il se peut que le faîte de sa maison soit brisé, que la trame de son lamba soit trop courte ou quil ne shabille pas en hiver ; il se peut que ce soit là le malheur dont il est maintenant atteint [...] mais si ce sont là des malheurs tels quil y en a sur la terre et sous les cieux, ce nest pas cela qui peut le faire arrêter ; sil nest pas coupable de sorcellerie, faites-le vivre ô Manamango. Je crains que le serpent deau ne vienne sur la terre, je crains les êtres dun talent supérieur, je crains les descendants dun talent supérieur ; je crains les lézards à deux queues, [...] quels que soient les dangers quil voie, ce nest pas cela qui le retient, ce nest que pour la sorcellerie que tu le mets à mort. Il a demeuré auprès du roi, il a demeuré auprès du peuple, mais ce nétait quune souillure, il na fait que salir la grande cuillère et que salir la zinga ; mais si cest là de la souillure ô Manamango, ce nest pas de la sorcellerie ; aussi laissez-le vivre. Il est allé du côté du nord, il est allé du côté du sud, il est allé du côté de lest, il est allé du côté de louest ; il a rencontré une pierre, il a rencontré un sorcier ; il a déclaré quil enduirait une pierre de graisse et pourtant il ne l'a fait aucunement ; il a déclarait quil donnerait de largent et pourtant il na pas agi conformément à sa déclaration, ni donné proportionnellement à sa fortune. Mais ce nest pas cela que vous retenez ô Manamango. Il a demeuré auprès du roi ; il a demeuré auprès du peuple ; il a demeuré auprès des gens quil aimait ; il a fait le serment du sang ; il a fait des choses pénibles, il en a fait damères ; je crains quil nait violé le veli-rano, quil nait contrevenu aux accords conclus, quil nait fait un faux serment, ô Manamango et je crains que ce ne soit là un danger funeste à ses jours ô Manamango. Aussi entendez, écoutez bien ; aussi ne prêtez pas loreille aux cris du peuple.
Références
- Rabearimanana, L.,
Mystique et Sorcellerie dans le Manuscrit de lOmbiasy (Manuscrit Hova de la Bibliothèque Grandidier - 1864-1870) - I. Le Tanguin. Omaly sy Anio, 1-2, 1975, pp. 295-324.
- G. S. Chapus et G. Mondain,
Le Tanguin, Bulletin de lAcadémie Malgache, t. XXVII, 1946, pp. 157-188.
Références sur la botanique du Tanguin à la Réunion.
- Nous croyons devoir signaler ici le tanghin du pays, dont il existe deux espèces : le sapium lineatum Spreng. et le sapium obtusifolium Spreng. Ces deux plantes appartiennent à la famille des euphorbiacées, tribu des hippomanées.
Lhonorable M. Richard, directeur du Jardin botanique, me racontait dernièrement quà loccasion dun empoisonnement par le tanghin du pays, il reçut mission de la Cour dassises de Saint-Denis de rechercher, et de produire aux débats la plante désignée sous ce nom. Il lapporta au Jury, et laccusé reconnut que cétait bien le végétal dont il sétait servi pour empoisonner son maître ; il lui en avait fait prendre dans ses aliments.
Il existe aussi : le tanghin de Madagascar (tanghinia Madagascariensis Dupetit-Thouars).
In : J. Le Clerc, Des plantes médicinales de lÎle de la Réunion et de leur application à la thérapeutique (Saint-Denis, 1864) pp. 20-21.
- E. Jacob de Cordemoy, Flore de lIle de la Réunion, Paris, 1895, p. 344 : STILLINGIA Garden. Sapium lineatum et levigatum Lam. Stillingia mauritiana H. Bn. (Vulg. Tanguin du pays, Bois de lait.) Arbuste à suc laiteux, très glabre. Feuilles lancéolées ou oblongues lancéolées, assez variables. Assez rare. Montagne Saint-Denis. Plante vénéneuse. Poison du cur.
- On signale à Mafate une "liane utilisée pour empoisonner les chiens", dénommée "mafate en bois" (sic pour : mafate [mahafaty] amboa = qui tue le chien...)
|
|
|