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le 26 juin 1995
Objet : Réunion des Directeurs de départements du 30 juin concernant le développement des filières de la Faculté.
Cher Collègue,
Lors de notre réunion du 13 de ce mois, je me suis permis de manifester mon étonnement, partagé par plusieurs collègues, davoir appris par les journaux la création de nouveaux diplômes à la Faculté. Aucun des Directeurs de département présents nétait dailleurs au courant de cette création, ainsi quil est apparu au sondage-minute effectué.
Sauf lintéressé, bien sûr, qui a argumenté [en réplique] que la communication moderne, à la différence de la démocratie ancienne, passait par les moyens de communication modernes... Et que le diplôme dont il a fait annoncer louverture par les journaux allait être avalisé par le Conseil de Faculté, puis par le CEVU et enfin par le Conseil dAdministration le plus réglementairement du monde... On aurait presque des scrupules à émettre la plus petite réserve sur la pertinence, le contenu et la validité scientifique dun plan aussi rondement mené.
Jai reçu un coup de téléphone dun notable dionysien - exerçant dans le milieu judiciaire - dont le neveu est intéressé par le journalisme et qui voulait savoir ce que valait cette formation annoncée dans la presse. Jai bien été obligé de lui répondre quil ny avait pas le plus petit iota de compétence en journalisme à la Faculté des Lettres et que si son neveu voulait apprendre le métier, il lui faudrait aller en métropole, ou à létranger.
Le journalisme ne simprovise pas et on ne simprovise évidemment pas formateur en journalisme. Quand le procureur [X] fait le procès de la presse réunionnaise, cest pour regretter que le chroniqueur judiciaire de tel quotidien nait probablement jamais ouvert un Code de Pocédure Pénale et que tel autre fasse tenir la rubrique par un titulaire... dun DEUG de communication. Je sais bien quen faisant venir les compétences de métropole et en flattant quelques intérês locaux on peut faire semblant... Mais que vaut une formation dont le chef dorchestre, de même que les musiciens titulaires dailleurs, ignorent la musique ? (À linverse de la démonstration quun chef de lOpéra vient de donner : lorchestre sétant mis en grève sans préavis, il se met au piano pour accompagner les interpètes de La Traviata....)
Jai évidemment plus intéressant à faire quà minquiéter de la qualité des prestations dans une discipline qui nest pas la mienne. Si je me suis manifesté, cest que tout cela se fait aux dépens de louverture dun DEUG, programmée par le précédent plan quadriennal, pour lequel deux enseignants ont déjà été recrutés - et un autre détourné dailleurs par le département [en cause](ouverture qui faisait lobjet de ma lettre au Doyen du 6 juin, dont ci-joint photocopie). Un proverbe syrien, que lactuel président fait mentir depuis pas mal dannées déjà, énonce quen Syrie, le pouvoir appartient au général qui se réveille le plus tôt. Sans doute ne nous réveillons-nous pas assez tôt, sans doute ne savons-nous pas manipuler les moyens de communication modernes et sans doute aussi le DEUG en cause na-t-il pour lui que son intérêt pédagogique...
Avec mes sentiments dévoués,
B. C.
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